Lettre à mes détracteurs

Salut vous autres,

vous pensez me connaître, mais vous ne me connaissez pas du tout. La plupart d’entre vous n’avez jamais même discuté avec moi via Internet. Ceux et celles d’entre vous qui considérez avoir essayé de discuter avec moi, la vérité c’est que vous vous êtes invité(e)s sur une ou plusieurs de mes pages ou m’avez abordée sur des fils de discussion pour me lancer des accusations (notamment racisme, islamophobie, transphobie ou sexisme), ou encore m’injurier, établir des diagnostics sur ma santé mentale ou même me dire que je ne devrais pas occuper le poste que j’occupe (sans avoir la moindre idée de mes compétences pour mon travail ni de la façon dont ça se passe à mon travail), en vous attendant apparemment à ce que ma réaction consiste à peu près en ceci : « Oh mais vous avez raison! Mea culpa, quel mauvais être humain je suis! Désormais, j’essaierai de devenir une bonne personne comme toi! » Je dis cela parce que j’ai vu les « rapports » que vous faisiez de vos tentatives de « discuter » avec moi à vos amis Facebook : « J’ai essayé de lui parler, mais ça ne sert à rien, elle est bockée ! » Sincèrement, pensez-vous qu’en abordant quelqu’un comme vous m’avez abordée, vous pouvez engager une discussion constructive ?

Vous inventez des histoires à mon sujet, et je me suis souvent demandé si vous inventiez consciemment vos histoires afin de me salir ou si vous en veniez vraiment à les croire. Sans doute certaines personnes qui ont entendu ces histoires sans en être les auteurs les ont crues sans plus de questions. Prenons quelques unes de vos prétentions à mon sujet, que certaines personnes semblent vraiment prendre pour la réalité.

Contrairement à ce que vous racontez allègrement, je n’ai jamais harcelé ni intimidé personne. Commençons par votre prétention de harcèlement et d’intimidation sur Facebook. Je me suis déjà moquée de plusieurs personnalités publiques, certes. Dalila Awada, Coraline Le Moyne, Camille Robert, Judith Lussier et d’autres. Rire de personnalités publiques de façon occasionnelle, dans un commentaire, un statut ou un meme, sans jamais toutefois chercher à exposer ni même à connaître des éléments de leur vie privée, sans chercher à les joindre personnellement pour les embêter, et surtout sans s’acharner continuellement sur elles* ni chercher à leur nuire dans leur vie de famille, leurs relations intimes, leurs activités professionnelles, sans inventer de mensonge à leur sujet pour les salir, n’est pas une forme de harcèlement ni d’intimidation. Non seulement c’est une façon d’agir légitime, mais de plus, vous êtes mal placés pour la reprocher à d’autres : pour autant que j’aie pu voir, vos commentaires sur des personnalités publiques telles que Mathieu Bock-Côté, Djemila Benhabib et bien d’autres, plus fréquents et hautement plus mesquins que tout ce que j’ai pu écrire sur Dalila, Coraline ou n’importe qui d’autre, se rapprochent beaucoup plus de l’acharnement. Si un seul d’entre vous lit cette lettre et réfléchit à cela, ça n’aura pas été une perte de temps.

Vous m’avez déjà associée à des commentaires qui venaient d’autres personnes. Oui, moi aussi, j’ai déjà vu passer des remarques sur Dalila Awada, Coraline Le Moyne, Judith Lussier ou d’autres (notamment Sarah Labarre, qui s’en prend souvent à moi sur son mur ou dans des fils de discussion, et qui semble même prétendre que je l’ai déjà intimidée, ce qui est complètement faux) dans lesquels on les attaquait sur leur physique, les accusait de certaines choses sans preuve, faisait des commentaires gratuits sur leur sexualité, etc. Qu’est-ce que j’ai à voir avec ça si ces commentaires ne viennent pas de moi et que je ne les approuve même pas? Cessez votre culpabilisation par association. Je ne suis pas responsable des fautes morales des autres.

Vous avez aussi prétendu que je harcelais des femmes en messages privés sur Facebook, ce qui est tout aussi faux. Considérez-vous qu’écrire en privé à quelqu’un qui écrit du mal de moi publiquement pour lui demander d’arrêter ou pour lui dire que je n’apprécie pas les mensonges qu’il diffuse à mon sujet, ou pour répondre à ce qu’il a écrit, est une forme de harcèlement ou d’intimidation? Si oui, alors je vous invite à revoir les définitions de ces termes.

Vous avez aussi identifié ma simple présence à des panels de féministes intersectionnelles comme une forme de harcèlement. Se présenter à un événement public, écouter en prenant des notes, et écrire sur le sujet par la suite n’est pas une forme de harcèlement. C’est un exercice légitime de ma liberté, notamment de ma liberté d’expression.

D’ailleurs, j’ai envie de revenir sur le panel sur la « décolonisation » du féminisme, où prenaient la parole Thérèse Kaligirwa Namahoro (non, l’appeler Thérèse n’est pas non plus une forme de harcèlement, pas plus, et je dirais même encore moins que quand vous appelez Mathieu Bock-Côté MBCile ou Sophie Durocher, Sophisme Durocher) et d’autres femmes. Vous en avez parlé dans le charmant document de plus de soixante pages que vous avez fait circuler à mon sujet pour salir ma réputation, et que vous avez même fait parvenir à mes patrons dans l’espoir que je perde mon emploi. Dans ce document, vous avez spécifié que ceux qui s’occupaient de la sécurité à cet événement avaient été prévenus de l’éventualité de ma présence, afin qu’ils réagissent si j’avais une attitude inappropriée. Vous avez aussi prétendu que j’avais en effet eu une attitude inappropriée, en riant et en interpelant une paneliste avec ce que vous appelez son « deadname« . Vous reconnaissez pourtant que je suis restée jusqu’à la fin, et vous avez même inclus à votre document le premier des trois textes que j’ai écrits sur cet événement. Comment expliquez-vous que ceux qui s’occupaient de la sécurité ne soient pas intervenus et ne m’aient pas demandé de quitter, alors que l’animatrice avait été très claire à l’effet qu’aucun commentaire déplacé ni intimidation envers les panelistes ne serait tolérées ? Moi je peux l’expliquer à ceux qui n’étaient pas présents à l’événement, mais qui ont gobé votre histoire : si la sécurité n’est pas intervenue, c’est parce que la vérité, c’est que je n’ai ni ri, ni parlé durant le panel, et les deux amis qui m’accompagnaient non plus. Nous sommes tous les trois restés assis sans bruit, eux en écoutant, moi en écoutant et en prenant des notes.

Depuis que vous avez fait parvenir votre fameux document à mes patrons, je vous ai vus à quelques reprises vous demander entre vous, sur des fils de discussion sur Facebook, pourquoi ceux-ci n’avaient pas encore réagi, depuis le temps que vous m’avez « dénoncée ». Dans votre document, vous tiriez des conclusions sur la façon dont ça se passe à mon travail : vous supposez – c’est là une autre fausseté que vous faites circuler à mon sujet – que j’intimide des élèves. Ailleurs que dans ce document, je vous ai vus prétendre que je tiens des propos discriminatoires durant mes cours, que je fais échouer des élèves en raison de leur origine ethnique, de leurs croyances ou d’autres caractéristiques personnelles, certains ont même tenté de me faire croire que vous déteniez des enregistrements que des élèves avaient fait de ces propos (or, pour que des élèves puissent faire des enregistrements de propos racistes, homophobes ou autres de ma part, il faudrait déjà que je tienne de tels propos dans mes classes, ce qui n’est pas le cas). Vous vous demandez sérieusement pourquoi la direction ne réagit pas…

Il ne vous est jamais venu à l’esprit que la direction ne réagissait pas pour la bonne raison que, contrairement à ce que vous racontez à droite et à gauche, je n’intimide aucun élève, je traite tous mes élèves avec professionnalisme et impartialité, les évaluant sur le contenu de leurs travaux, peu importe leurs caractéristiques ? Vous ne me côtoyez pas. Mes patrons et mes collègues, eux, me côtoient, ainsi que mes élèves. Oui, je suis anti-théiste, pour la laïcité, très critique des religions, féministe universaliste, contre l’idéologie du genre, contre les croyances et pratiques religieuses en général et contre le voile islamique en particulier, et je m’exprime dans mes écrits, comme tout citoyen et toute citoyenne est en droit de le faire. Cependant, je suis capable de concilier mes opinions sociales et politiques avec mes obligations professionnelles au travail, et je suis capable de voir les êtres humains qui sont devant moi, surtout quand j’ai des responsabilités envers eux, indépendamment de ces opinions. Tous mes élèves peuvent compter sur un traitement juste et impartial, que ce soient des gens religieux, des femmes voilées, des personnes trans, ou encore des gens qui mangent chez McDonald (car je suis aussi contre McDonald). Et cela, mes patrons le savent. Ils me connaissent mieux que vous, ils sont capables de le voir que vous leur racontez des histoires inventées. Sérieusement, vous n’avez même pas pensé à ça? Que si mes patrons et collègues ne réagissent pas aux fautes graves que vous m’attribuez dans le cadre de mon travail, c’est que ces fautes n’existent pas?

Passons à une autre des faussetés que vous véhiculez à mon sujet : je n’ai rien à voir avec la Meute, les Soldats d’Odin, la Storm Alliance, etc. Les seuls groupes militants dont je fais partie sont Pour les droits des femmes du Québec et le Mouvement laïque québécois. Toute prétention que je suis associée à un autre groupe militant que ceux-là relève de l’erreur ou du mensonge.

Votre conception de l’éthique semble très différente de la mienne. Selon ma conception de l’éthique, il existe des devoirs qu’on a envers tous les êtres humains, peu importe les relations qu’on a avec eux. Mentir pour nuire à quelqu’un, harceler, intimider, inciter quelqu’un à se suicider, faire des remarques gratuites sur sa santé mentale, chercher à faire perdre son emploi à quelqu’un pour des raisons qui n’ont à voir ni avec sa compétence au travail, ni avec ses relations avec ceux qu’il côtoie au travail**, sont des choses qui ne se font pas, même avec des gens que je n’apprécie pas, même quand je suis fortement convaincue d’avoir d’excellentes raisons de ne pas les apprécier. J’épaulerais n’importe lequel de mes collègues à qui on essaierait de faire ce que vous avez essayé de me faire, c’est-à-dire faire pression sur la direction pour qu’elle le sanctionne parce qu’il a utilisé sa liberté d’expression d’une façon légitime, en dehors de son milieu de travail en plus.

C’est intéressant d’ailleurs : vous hurlez à l’injustice parce qu’on parle de demander à des femmes (les musulmanes qui portent le voile) de s’abstenir d’afficher leurs croyances religieuses ALORS QU’ELLES SONT AU TRAVAIL, en invoquant souvent la liberté d’expression et de conscience. Or je suis sûre que vous savez comme moi que la liberté d’expression et de conscience, comme tous les droits, s’exercent dans un certain cadre. Personne ne peut exprimer n’importe quoi à son travail (un employé de chez Tim Horton ne peut pas dire à un client qu’il le trouve con et laid, un policier ne peut pas tutoyer un civil lorsqu’il s’adresse à lui, je ne peux pas tenir dans ma classe des discours identiques à ceux que je tiens dans mes écrits, parce que j’ai le devoir de présenter plusieurs auteurs à mes élèves, des auteurs avec des perspectives différentes, etc.) Mais ce qui est surtout drôle, c’est que vous hurlez à l’injustice parce qu’on parle d’établir des balises à la liberté d’expression SUR LE MILIEU DE TRAVAIL, mais vous endossez que l’on prive quelqu’un de son emploi en raison de ce qu’il exprime EN DEHORS DU TRAVAIL.

Revenons à nos conceptions respectives de l’éthique. Selon moi, le monde ne se divise pas en bonnes personnes et en mauvaises personnes. Il y a des opinions et des façons d’agir que je considère comme déplorables, mais personne n’a toujours tort. Et surtout, même si quelqu’un agit d’une manière déplorable, il a quand même des droits et c’est quand même un être humain. S’il est inacceptable de mentir pour salir quelqu’un, ou de harceler quelqu’un, ou de chercher à lui faire perdre son emploi pour des raisons non pertinentes, de lui suggérer de se suicider ou de souhaiter sa mort, ça demeure inacceptable même quand on le fait à quelqu’un qui agit de façon déplorable.

De votre côté, vous divisez le monde en bons et en mauvais. Vous êtes rapides pour vous scandaliser d’un meme où il est écrit que Camille Robert est niaiseuse, puisque selon vos critères, elle fait partie des bons, mais par contre, quand il s’agit d’une personne qui fait partie des mauvais (toujours selon vos critères), il semble que tout soit permis : la traiter de vidange, de merde, mentir pour salir sa réputation, l’inviter à se tirer une balle, chercher à lui faire perdre son emploi. J’ai même déjà vu certains d’entre vous encenser la violence physique et se réjouir de la mort de certaines personnes. C’est une conception de l’éthique qui ne peut être que celle de fanatiques, de gens dogmatiques et sans nuances. De gens qui déshumanisent ceux qui ne pensent pas comme eux.

Pensez-vous vraiment que vous défendez la justice sociale en agissant comme vous le faites? Je vous laisse y réfléchir. Je ne me fais pas d’idées, il est probable que ma lettre sera lue par davantage de gens à qui elle ne s’adresse pas que de gens à qui elle s’adresse, et surtout, prise au sérieux surtout par des gens à qui elle ne s’adresse pas et qui ont déjà remarqué votre façon d’agir (qui en ont peut-être même eux aussi été des victimes). Mais encore une fois, si un seul d’entre vous réfléchit sérieusement après l’avoir lue, je n’aurai pas perdu mon temps.

 

*Vérifiez le nombre de fois que j’ai ri de Coraline Le Moyne, par exemple : je vous assure que j’écris moins souvent sur elle que l’inverse. Le nombre de memes où j’ai ri d’elle s’élève à…deux. On ne peut guère parler d’acharnement. Si elle vous parle des fois où je lui ai écrit en privé, demandez-lui donc des captures d’écran des échanges que nous avons eus : je lui demandais de me laisser tranquille, et quand elle niait avoir écrit des méchancetés sur moi, je lui montrais des captures d’écran que j’ai de ses propos sur moi.

Vérifiez aussi la fréquence à laquelle je parle de Dalila Awada, pour le fun. Dites-vous bien que si vous êtes obligés de remonter jusqu’en juillet de l’année dernière, pour en trouver un bon nombre…enfin je vous laisse tirer vos propres conclusions. Encore pire si vous devez (encore) retourner chercher ce meme avec la photo d’une dinde ! Ce foutu meme que je n’ai pas fait, simplement partagé – mais j’abandonne l’espoir de vous faire admettre qu’il ne venait pas de moi – même à supposer qu’il ait été fait par moi : vous rendez-vous compte que ce meme date d’il y a cinq ans? Décrochez un peu! Et rendez-vous compte que des memes où on compare des personnalités publiques à des animaux pour se moquer d’elles, ça existe en masse ; ce n’est pas parce que Dalila Awada, que vous adorez, est la cible, que ça devient plus inacceptable.

Pensez-vous que j’ai déjà harcelé Thérèse Kaligirwa Namahoro? Comme beaucoup de gens, j’ai réagi à ses façons d’agir odieuses : elle injurie les gens, lance des sarcasmes, pour s’étonner ensuite d’être mal reçue. Elle s’en prend à quelqu’un à répétition, le salit auprès de ceux qui la suivent, et quand la personne réagit, elle fait semblant d’être la victime. Réagir à cela n’est pas du harcèlement. Et laquelle de nous deux a mobilisé des gens pour chercher à faire perdre son emploi à l’autre? Laquelle de nous deux a orchestré une campagne de salissage sur l’autre? Soyez donc honnêtes.

 

**Je vous vois venir à propos de la laïcité : quand un fonctionnaire porte un signe religieux, ça a à voir avec ses relations avec les personnes qu’il côtoie au travail. L’habillement ne sert pas seulement à se protéger des intempéries, il est en même temps un outil de communication. Des contraintes vestimentaires plus ou  moins strictes existent dans tous les milieux de travail – ainsi que dans d’autres contextes – précisément pour cette raison-là. On vous voit rarement lutter contre les codes vestimentaires qui existent déjà sous prétexte que « chacun a le droit de s’habiller comme il veut et que seuls des fascistes dictent aux autres comment s’habiller ».

 

Mon grain de sel sur ce qui s’est passé à l’Amère à boire

Je suis inclusive

 

D’abord, je remercie Alexandre pour s’être donné la peine de me fournir une belle série de captures d’écran (qui me confirment à nouveau combien mon idée de prendre congé de Facebook était excellente), qui montrent les réactions de la gauche régressive face à l’exclusion de Jérôme Blanchet-Gravel du bar L’Amère à boire, initiative d’un employé, qui n’a apparemment pas été endossée par les patrons :

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Jérôme Blanchet-Gravel est quelqu’un que je ne connais qu’un peu, pour l’avoir côtoyé à quelques reprises lors de colloques ou de lancements de livres. Lui et moi ne sommes pas d’accord sur tout. Mais c’est sans importance ici : le principal, c’est que personne n’a à se faire exclure d’un bar pour ses idées politiques. Si Jérôme dit vrai en affirmant qu’il n’a fait que boire de la bière et discuter tranquillement avec ceux qui étaient attablés avec lui – et personne n’a apporté la moindre preuve qu’il ait fait quoi que ce soit d’autre, ni quoi que ce soit qui justifie l’expulsion d’un bar – alors le geste de l’employé était illégitime, et même illégal puisqu’on n’a pas le droit de discriminer les gens en raison de leurs idées politiques.

C’est quelque chose que ceux de gauche régressive ne comprennent pas : quand on a de l’intégrité morale, si on estime que quelque chose ne se fait pas, ça ne veut pas dire « Personne ne doit faire ça aux gens que j’apprécie. »

Leur vision du  monde est beaucoup trop manichéenne, et cet Alain Robert que l’on voit intervenir sur la capture d’écran ci-dessous l’exemplifie parfaitement ; il ne peut manifestement pas concevoir que l’on s’oppose à l’expulsion de quelqu’un pour ses idées politiques peu importe qui il est, et sans être fan de lui.

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Pendant que je parle de lui, j’en profite pour mentionner qu’il est d’une misogynie crasse. D’ailleurs, toutes les « féminisses » intersectionnelles qui traitent Jérôme B-G de misogyne mais qui s’allient avec Alain, vous feriez bien de penser à vous opposer à la misogynie dans votre propre cour : je ne vous vois jamais reprendre Alain quand il fait des remarques sur le physique des femmes qui n’adoptent pas la ligne de pensée de la gauche régressive, notamment, ni quand il appelle une femme « la » suivie de son nom de famille (« la Benhabib, la Collin »), ni à aucune autre de ses manifestations de misogynie. La même chose d’ailleurs pour Michel Sancho, qui avait ce commentaire très constructif à faire sous la publication de l’Amère à boire :

sancho misogyne.png

Pendant que je suis dans les coucous à ceux, parmi les internautes qui apparaissent sur les captures d’écran qu’on m’a fournies, qui font partie des enragés qui font une fixation sur moi, je ne vais certainement pas me priver d’en inclure un qui ne décroche pas depuis 2013 : coucou Lafond! En prétendant que Jérôme Blanchet-Gravel stigmatise des gens mais pas Jaggi, toi aussi tu montres ta vision du monde selon laquelle il y a des Bons et des Mauvais, et que tous les coups sont permis avec les Mauvais tout en étant inacceptables avec les Bons (en témoigne d’ailleurs également ta rancune éternelle pour un meme datant de 2013 qui ridiculisait Dalila Awada alors que tu es l’auteur de plusieurs memes faits pour ridiculiser des gens). Au fait : « la stigmatisation d’une communauté »? As-tu déjà lu au moins un texte de JBG au complet? Ah non, scuse, il y a trop de mots pour toi. Pour que tu retiennes quelque chose, ça doit être sous forme de meme, pas plus qu’une phrase.

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Voici une capture d’écran qui représente très bien la contradiction que je soulève dans le meme en photo principale…sauf que ça, ce n’est pas une blague!

On exclut un individu parce qu'on est inclusif.png

C’est quand même quelque chose, et malheureusement typique de la gauche régressive : prétendre qu’on se montre inclusif en excluant des gens. La réaction lorsqu’on demande des preuves que JBG est raciste, d’extrême-droite ou autre est tout aussi typique : on se fait répondre qu’on a juste à lire ce qu’il écrit. Quand on finit par obtenir des extraits précis, ils ne prouvent rien de ce qu’ils sont censés prouver.

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Je ne connais pas cette Sarah, mais elle semble très douée pour faire des interprétations tordues. C’est malheureusement ce genre de propos qui donne une mauvaise image du féminisme, une image que les féministes universalistes doivent ensuite combattre. Et encore :

va voir son blogue, encore.png

Et le franglais, tout aussi typique de la gauche régressive. D’ailleurs, j’ai retenu cette autre capture, elle est trop délicieuse :

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Il y a quelques mois, j’écrivais un texte dont le titre était « Quelle extrême-droite? », car il me semblait qu’on organisait une manifestation pour s’opposer à un monstre imaginaire. Ce monstre imaginaire continue apparemment de hanter l’esprit de certaines personnes:

Quelle extrême-droite?.png

Quand est-ce qu’on a eu affaire à des représailles de la part de groupes ayant des idées politiques d’extrême-droite qui menaçaient la sécurité de personnes ? À ma connaissance, on a eu affaire à ça venant de l’extrême-gauche. Mais quand est-ce qu’on a vu ça de la part de l’extrême-droite ? Et ce n’est pas la seule ineptie que j’ai pu voir dans les captures d’écran qu’on m’a montrées : on accuse l’Amère à boire de cautionner le fascisme, JBG de faire l’apologie du harcèlement sexuel. Les enflures verbales ne manquent généralement pas sur Facebook, et on peut dire que la gauche régressive en a donné un bel exemple avec leurs réactions à ce qui s’est passé à l’Amère à boire.

Pour ma part, à première vue, la réaction des patrons me paraît insuffisante, mais étant donné qu’ils n’ont pas forcément laissé savoir publiquement tout ce qu’ils ont fait, je préfère garder une réserve. J’espère que l’employé fautif a été congédié (expulser quelqu’un à cause de ses idées politiques et lui faire des menaces, ce n’est pas une simple petite erreur).

Mes vacances de Facebook et de la gauche répressive

Bye bye Facebook

 

Je ne suis pas la première à relever les problèmes liés aux médias sociaux. Le sociologue et philosophe Mathieu Bock-Côté en a d’ailleurs fait un de ses sujets de prédilection. Épuisée par l’année 2017-2018, par divers facteurs mais dont plusieurs sont liés à Facebook, j’ai décidé que mes vacances du boulot de cet été seraient en même temps des vacances de Facebook. J’ai désactivé mon compte Facebook et je laisse les amis qui ont bien voulu administrer ma page d’auteure y publier mes billets de blogue et de webzine. On ne se le cachera pas : Facebook peut être une source de stress, et alors il vaut mieux s’en éloigner.

 

Je profiterai de ce billet pour dénoncer autre chose, que je ne suis pas non plus la première à dénoncer : la violence d’une frange de gauche, qui s’autoproclame défenseure de la justice sociale, des femmes, des minorités sexuelles, des minorités ethniques et des minorités religieuses, mais que Maajid Nawaz a fort justement baptisée en la désignant comme gauche régressive. Je vais même piquer son idée à une amie qui suggère de changer « gauche régressive » par « gauche répressive » (rendons à César ce qui est à César : excellent, Avril Spartan !)

 

Les billets de blogue et les chroniques dénonçant les façons d’agir de cette soi-disant gauche se multiplient depuis un bon moment. Je ne suis pas la première à souffrir de leurs méthodes, ni celle qui en souffre le plus. J’ajoute néanmoins mon grain de sel à ces dénonciations, parce que la violence verbale et psychologique de ce genre de militants doit être dénoncée le plus possible. Si ce n’était que moi, j’y verrais un cas isolé qui n’est que mon problème, mais puisque bien d’autres en ont parlé avant moi, j’en tire la conclusion que ça représente sans doute un véritable problème de notre époque.

 

Les attaques de la gauche régressive

Voici ce qu’on m’a fait subir sur Facebook depuis deux ans :

 

– Ça a commencé avec des attaques groupées sur mon propre mur Facebook, le tout orchestré par une militante agressive qui avait un certain leadership à l’époque (elle est tombée de son piédestal depuis) : de purs étrangers venaient sur mon mur m’injurier et me dire que je ne devrais pas occuper l’emploi que j’occupe ;

 

– la même militante a lancé l’idée de me traquer sur Facebook pour rassembler des captures d’écran de mes propos soi-disant sexistes, misogynes, homophobes, transphobes, racistes, afin de s’en servir pour me nuire. Ce qui a été fait. On est allé jusqu’à faire circuler un document de plus de 60 pages avec des captures d’écran, ainsi que des photos de moi qui ont été prises à mon insu alors que j’assistais à des panels sur le féminisme intersectionnel (je reviendrai sur ce point). Le document ne m’a pas vraiment inquiétée, j’ai même eu l’occasion de le lire et il n’est pas compromettant pour moi (en effet, je ne suis ni sexiste, ni misogyne, ni homophobe, ni transphobe, ni raciste ; je suis plutôt contre le féminisme intersectionnel, contre l’idéologie du genre, pro-laïcité et anti-théiste ; mes détracteurs ont beau ne pas faire la différence, d’autres la font très bien). Cependant, l’intention de me nuire est très claire et on y retrouve, en dehors des captures d’écran, des jugements et des mensonges de la part des militants qui ont conçu ce document, qui n’ont d’ailleurs même pas le courage de révéler leur identité ;

 

– par ailleurs, on a aussi fait des publications sur Facebook avec des captures d’écran de mes propres publications, sous lesquelles des militants se crinquaient entre eux contre ma personne et écrivaient des commentaires mesquins (j’en ai vu un certain nombre, par exemple sur la page Les venimeux de la province bleue, qui n’existe plus, et sur les pages personnelles de plusieurs personnes, mais il y en a probablement un nombre encore plus grand que je n’ai pas vues, puisque se réfugier dans des groupes secrets et des pages privées pour parler dans le dos des gens fait partie des stratégies de cette soi-disant gauche) ;

 

– parlons-en, de ma présence aux panels de féministes intersectionnelles : en tant que militante féministe universaliste, et étant donné ma discipline, qui est la philosophie, il est dans l’ordre des choses que j’assiste à des panels, des colloques et des conférences sur le féminisme (et aussi sur d’autres sujets tels que le racisme, les minorités sexuelles, etc.). De façon tout à fait gratuite, on a prétendu que ma simple présence représentait une forme de harcèlement envers les panelistes. Encore une fois, on s’est permis de prendre des photos de moi à mon insu. On aurait voulu m’interdire d’assister à ces activités, même si je n’y causais aucun problème : je ne faisais qu’écouter et prendre des notes, puis écrire mes impressions ensuite. J’ai même reçu des messages d’une inconnue me disant de ne plus jamais me présenter à ce genre d’événement et que la prochaine fois, elle me ferait sortir. Je ne me suis pas laissée impressionner, mais dire que je n’ai pas été blessée serait un mensonge ;

 

– depuis que j’ai une page d’auteure sur Facebook, plusieurs militants y sont allés, notamment dans la section des évaluations, pour écrire des commentaires gratuits et blessants ;

 

– finalement, on sort carrément de Facebook quand ces militants cherchent à utiliser ce que je fais sur Facebook pour me nuire au travail, ce qu’ils ont fait plusieurs fois (j’y reviens plus loin). On a aussi essayé de m’empêcher d’avoir des tribunes, et on a protesté quand on m’en donnait, en disant carrément qu’on ne devrait pas me laisser écrire ou prendre la parole. On a cherché à convaincre ceux qui souhaitaient me donner une tribune d’y renoncer.

 

Mensonges, mesquinerie : faites ce que nous disons, ne faites pas ce que nous faisons

 

Les commentaires, jugements et mensonges que font ces militants sont d’une mesquinerie et d’une malhonnêteté saisissantes. On y retrouve des attaques sur mon physique et sur mon intelligence. À plusieurs reprises, on a prétendu que j’avais des problèmes de santé mentale. On insinue que je n’ai pas d’amis, que mes collègues me haïssent, etc. On me traite de vidange humaine, de déchet, de merde, etc. Certains sont allés jusqu’à souhaiter mon suicide ou ma mort.

 

On a fait courir le bruit que je faisais de la cyberintimidation, ce qui est complètement faux. Il m’est arrivé de faire des publications où je me moquais de personnalités publiques, de dénoncer les discours de certaines personnes, de répliquer à des internautes, mais rien de ce que j’ai fait ne peut être classé comme de l’intimidation. Ironiquement, ce sont ceux qui me font réellement subir ce qui ressemble dangereusement à de l’intimidation, qui prétendent que je m’en suis rendue coupable.

 

Outre le mensonge comme quoi j’aurais intimidé des gens, voici d’autres mensonges qu’on fait circuler pour me nuire : que je fais partie de groupes d’extrême-droite, que je hais les personnes trans et les musulmans, que je suis raciste, misogyne, homophobe, que je fais de la discrimination à mon travail. Ils hallucinent également des faux comptes de moi sur Facebook un peu partout (contrairement à eux, je n’ai pas que ça à faire dans la vie, me faire des faux comptes pour traquer les gens sur Facebook) ; certains de mes amis m’ont rapporté avoir déjà eu affaire à des internautes qui prétendaient que leur compte est un faux compte à moi.

 

Le deux poids deux mesures des militants que j’ai sur le dos est d’ailleurs à souligner. Oui, il m’arrive d’être très impertinente sur Facebook. Je l’assume. Et contrairement à eux, je n’ai pas la prétention de défendre la justice sociale quand je me moque de Dalila Awada, de Xavier Camus, de Camille Robert, de Cora Lemoyne ou d’autres personnalités publiques. Cependant, je ne fais jamais de commentaires sur la vie privée des gens, sur leur santé mentale, je ne diffuse pas de mensonges pour nuire à la réputation des gens, je ne cherche jamais à atteindre les gens en dehors d’Internet, ni même sur Internet en fait, parce que je n’ai pas l’habitude d’aller sur leurs propres pages pour les emmerder (les rares fois où c’est arrivé, c’est généralement parce qu’il y était question de moi : ils peuvent difficilement se plaindre que je réplique).

 

De leur côté, ils ne se limitent pas à être impertinents : ils s’acharnent sur des personnes et cherchent à leur nuire aussi bien sur Internet qu’en dehors d’Internet (notamment à leur travail), ils ne se gênent pas pour faire circuler des mensonges. Et pourtant, à la moindre publication moqueuse de ma part, ils se mobilisent en groupe pour m’écrire des commentaires agressifs et injurieux, qui dépassent de loin le niveau de la publication qu’ils commentent (sans compter que se rassembler en troupeau pour attaquer quelqu’un a son effet, un effet qu’une moquerie qui vient d’une seule personne n’a pas).

 

Pour avoir vu les publications et les commentaires qu’ils peuvent faire sur des gens (pas seulement sur moi), je garantis que je n’ai jamais atteint leur niveau de mesquinerie. Bien rarement les voit-on faire remarquer à l’un des leurs qu’il dépasse les limites. Quand on attaque des personnes qu’ils identifient comme faisant partie du camp des méchants, tous les coups sont permis. Quand on s’en prend à des personnes qu’ils identifient comme leurs alliées, même une blagounette insignifiante ou un commentaire insignifiant, comme de traiter quelqu’un de gros épais ou de niaiseux, devient un drame.

 

La police des moeurs autoproclamée

 

Après plusieurs tentatives pour me nuire au travail (leur souhait de me voir suspendue, voire congédiée, est explicitement formulé dans plusieurs échanges sur Facebook que j’ai pu voir), toutes infructueuses, pensez-vous qu’ils se remettent en question et se demandent s’ils ne se sont pas trompés ? Mais non voyons ! Après tout, eux qui me traquent sur Facebook, en s’assurant de donner des interprétations infamantes à mes propos (ce n’est pas grave si ces interprétations sont tordues, tant qu’on peut continuer de nourrir la certitude que je suis un monstre), doivent savoir mieux que mes patrons et collègues qui me côtoient sur une base quotidienne dans mon milieu de travail…

 

Parce que je défends des positions opposées aux leurs, notamment sur les religions, sur la laïcité, sur le féminisme et sur l’idéologie du genre (qui n’a rien d’une théorie), ils se permettent de décréter que je ne devrais pas occuper le poste que j’occupe et spéculent sur les relations que je dois avoir avec ceux que je côtoie au travail.

 

Je ne donnerai pas de détails sur leurs tentatives pour me nuire au travail, je dirai simplement que j’en énumère 11 jusqu’ici. Heureusement, toutes infructueuses, car à mon travail, on sait que, bien loin de poser des problèmes, je fais un excellent travail et que mes relations avec les autres, qu’il s’agisse de patrons, de collègues ou de clients, sont généralement très bonnes. En fait, certaines plaintes sont accompagnées de mensonges tellement énormes que leurs auteurs ne réussissent qu’une chose : montrer à mes supérieurs que soit ils sont malhonnêtes, soit ils confondent ce qui sort de leur imagination avec la réalité.

 

Message à mes détracteurs

 

Chers détracteurs, c’est à vous que j’adresse ces paragraphes : oui, vous avez réussi à me faire du mal. Vous avez réussi à me blesser à de nombreuses reprises. Vous allez sans doute jubiler en apprenant que je me retire de Facebook et qu’en plus, c’est «grâce» à vous. Mais j’ai pris conscience que Facebook n’est pas si important. Je veux bien vous laisser cette plateforme puisqu’il semble que ce soit tout ce que vous avez pour occuper vos journées. Sachez par contre que vous ne me ferez pas taire, ni abandonner mes activités militantes. Vous n’avez pas réussi à me faire perdre l’envie d’écrire. Vous n’avez pas non plus réussi à m’atteindre au travail : ceux qui me côtoient au travail et qui sont au courant de vos tentatives, bien loin d’avoir une opinion négative de moi suite à ces dernières, sont désolés pour moi que je doive subir ce que vous me faites subir depuis deux ans.

 

J’ai autre chose à vous dire, chers détracteurs : dans mon cas, vous vous en prenez à une personne moralement forte. Les dégâts que vous avez causés se limitent à m’avoir fait beaucoup de peine et à faire en sorte que j’en aie marre de Facebook. Cependant, il n’y a pas qu’à moi que vous faites subir ce genre de traitement. Vous ne connaissez généralement pas les personnes sur qui vous vous acharnez, aussi vous ignorez quel impact vos écrits infâmes peuvent avoir. Quand vous écrivez de quelqu’un qu’il a des problèmes de santé mentale, avez-vous déjà envisagé la possibilité que ce soit vraiment le cas, et au mal que vous lui feriez le cas échéant ? Avez-vous déjà pensé que certaines de vos victimes pourraient être des personnes dépressives ou suicidaires ? Que vos méchancetés pouvaient aggraver leur cas, voire être la petite goutte qui fait déborder le vase et les fait passer à l’action ? Vous ne savez pas non plus quelles autres cordes sensibles vous pouvez toucher. Pensez-vous vraiment que vous défendez la justice sociale en attaquant des gens ? Quelle crédibilité pensez-vous avoir après quand vous reprochez à quelqu’un comme moi de ne pas se soucier de la souffrance des personnes trans, simplement parce que je critique l’idéologie du genre ? Je n’attaque pas personnellement les personnes trans, je ne les harcèle pas, je m’attaque à une idéologie. Vous, ce sont des gens que vous attaquez.

 

Chers amis, contacts Facebook et alliés, c’est maintenant à vous que je m’adresse. Je continuerai d’écrire sur mon blogue (comme vous pouvez le constater) et sur les deux webzines auxquels je contribue. Depuis que j’ai ma page d’auteure sur Facebook, j’ai des amis qui l’administrent avec moi, elle est donc toujours active même si j’ai désactivé mon compte personnel. Durant mon absence de Facebook, les autres administrateurs prendront soin d’y publier mes billets. Je vous rejaserai sur Facebook quand je serai bien reposée.

Moineaux et moinelles, intersectionneaux et intersectionnelles

Mon néologisme : les intersectionneaux

 

Mon opposition farouche au féminisme intersectionnel, et l’impertinence que je me permets souvent quand j’en parle sur les réseaux sociaux, donnent à certains l’impression que je suis antiféministe, voire sexiste ou misogyne. J’ai pourtant toujours été à fond pour l’égalité. Cependant, le caractère irrationnel et émotif des discours des féministes intersectionnelles a tout pour m’éloigner. Les intersectionnelles m’agressent avec leur victimisation, avec leurs accusations constantes, avec leur façon d’agresser verbalement les gens et de pleurer à l’injustice (et au patriarcat) quand elles sont mal reçues, alors qu’avec l’attitude qu’elles ont, elles devraient s’y attendre.

 

Mes expériences avec les intersectionnelles se sont pratiquement toujours déroulées de la même façon (que j’échange avec elles ou que je les écoute passivement). Quand on leur demandait de spécifier ce que signifiaient certains mots qu’elles utilisaient ou certains principes qu’elles évoquaient, ou encore d’apporter des preuves des affirmations qu’elles avançaient, ou encore qu’on questionnait leurs affirmations, on avait droit à des réponses qui se situaient toujours dans l’une de ces catégories :

 

-Ben là, c’est évident !

 

-Informe-toi ! J’ai fait mes devoirs, je ferai pas les tiens à ta place !

 

-Tu appuies le patriarcat ! (Et cela vient souvent avec : « Tu cherches à assurer tes privilèges d’homme/de Blanc(he)/de cis/autre catégorie de soi-disant privilégiés !»)

 

-Ça sert à rien de discuter avec quelqu’un de con/bouché comme toi.

 

Dans tous les cas, elles avaient l’habitude de déformer les propos de quiconque défendait une position différente des leurs ou remettait en question leurs positions.

 

Ces derniers jours, sur Facebook, j’ai eu affaire à ce que j’appellerai affectueusement des intersectionneaux : un équivalent masculiniste des féministes intersectionnelles. Il y a les oiseaux et les oiselles, les moineaux et les moinelles, les intersectionnaux et les intersectionnelles. Un ami à moi a sorti l’appellation « Judith Lussier avec un pénis », qui m’a fait pouffer de rire, aussi je ne résiste pas à vous la mentionner…mais après tout, évitons de cibler une seule personne, surtout que la pauvre Judith ne mérite pas de porter le poids pour toutes ses semblables.

 

À écouter ces intersectionneaux, on vivrait désormais dans un matriarcat au Québec, ce qui est franchement une enflure verbale. Et pourtant, à les lire, ce matriarcat relèverait de l’évidence au point que seules des féministes enragées ou des gens de mauvaise foi pourraient le questionner. Autant les féministes qui prétendent que le patriarcat sévit toujours autant au Québec, ou pire, celles qui parlent de blantriarcat en mettant tout sur la faute de l’Occident, alors que ce dernier est sans doute, de toutes les grandes civilisations, celle où le patriarcat a le plus reculé, tiennent un discours ridicule, autant ceux qui prétendent que nous vivons dans un matriarcat leur feraient très bien concurrence dans une compétition de ridicule. Les intersectionneaux se mesurent bel et bien à leur équivalent féminin…les masculinistes irrationnels et émotifs (qu’ils acceptent cette appellation ou pas) face aux féministes irrationnelles et émotives.

 

Ce que je reproche aux intersectionneaux

 

Tout a commencé avec une chronique de Denise Bombardier, une chronique qui ne présente rien d’autre que des accusations à la fois impersonnelles et sans faits pour les étayer (ce qui m’a franchement déçue de la part de Bombardier, qui m’avait habituée à mieux) :

« C’est une société qui tend à infantiliser les hommes »

« Dans notre matriarcat, la mère est tour à tour castratrice et complaisante. »

« L’école apprend aussi aux garçons à être des filles. C’est sans doute pourquoi ils finissent trop souvent par devenir si enragés et si perturbés. »

 

Et j’en passe…comme tous ceux qui prétendent que le Québec est un matriarcat, Bombardier ne fait que dans le sentiment, la victimisation…aussi pleurnicharde qu’une féministe intersectionnelle, même si elle va dans le sens contraire ! Et ceux que j’ai vus applaudir à son texte en confirmant que le Québec est un matriarcat la suivent très bien. Tout comme les intersectionnelles, ils parlent comme si leurs affirmations tenaient de l’évidence et n’avaient pas besoin d’être étayées par des faits. Quand ils daignent apporter des «preuves», il s’agit en fait d’indices largement insuffisants, glanés ici et là dans leurs expériences personnelles ou dans des chroniques et billets de blogues. Ils se mettent en colère quand on fait remarquer que leurs arguments ne sont pas suffisants pour prouver leur conclusion.

 

Attention, affirmer que le Québec est un matriarcat est très différent de dire que les garçons et les hommes vivent des difficultés spécifiques à leur sexe et que la société doit y remédier. Je fais la différence entre les féministes raisonnables – et du féminisme, on en a encore besoin, à une époque où le multiculturalisme contribue à gruger les acquis des femmes, où on s’apprête à légaliser le commerce de mères porteuses au Canada, et où d’ici là, des Canadiens profitent de l’exploitation de mères porteuses d’autres pays, et je pourrais continuer mais je ne veux pas trop m’éloigner de mon sujet principal – et les féministes qui assimilent tous les hommes à Marc Lépine, qui prétendent que le Québec est une culture du viol (une autre enflure verbale), qui n’acceptent aucune remise en question de leurs positions, qui blâment constamment les hommes. Tout comme je fais une différence entre les féministes raisonnables qui ont des revendications justifiées et celles qui sont émotives, irrationnelles et blâment le Patriarcat comme si c’était une sorte d’équivalent de Satan dans la religion chrétienne, je fais aussi une différence entre ceux qui mettent de l’avant des revendications légitimes pour l’épanouissement des garçons québécois – parce que c’est un fait bien établi que ces derniers sont nombreux à avoir des difficultés à l’école, et comme société, on a le devoir de réagir à cela – et ceux qui blâment rageusement les féministes (parce que là, ce seraient elles, l’équivalent de Satan).

 

À quoi bon blâmer le féminisme ?

 

Qu’est-ce qui prouve que les difficultés des garçons à l’école sont à cause des féministes ? Parce que c’est ce qu’affirment Bombardier et plusieurs autres. Les féministes ont obtenu que les femmes puissent voter, être propriétaires, aller à l’université, avoir un certain contrôle sur leur corps, notamment quant à la reproduction et à leur vie sexuelle, avoir accès à des emplois pour lesquels il n’y a aucune différence entre les sexes qui justifie d’en faire des emplois masculins. Aujourd’hui, elles continuent de réagir à des formes d’oppressions et à des injustices envers les femmes qui existent bel et bien ; j’en ai nommé deux précédemment, on pourrait aussi mentionner notamment les mariages forcés, l’exploitation sexuelle, l’excision, l’endoctrinement religieux qui met dans la tête des enfants que la femme est inférieure (si les trois premières existent plutôt dans d’autres pays – ce qui n’empêche pas que les féministes d’ici puissent y réagir – la dernière existe bel et bien au Québec).

 

Ce serait à cause de ces gains des femmes par le passé et de ces dénonciations qui continuent aujourd’hui que les garçons ont de la misère à l’école ? Permettez-moi d’en douter ! À moins que les garçons aient absolument besoin que les femmes soient en position d’infériorité pour pouvoir s’épanouir ? Permettez-moi aussi d’en douter. Mais ce n’est probablement pas non plus ce que veulent dire ceux qui nourrissent la conviction que les problèmes des garçons sont dus au féminisme…mais alors quel est leur raisonnement ? J’ai essayé de le comprendre, mais je n’ai eu droit qu’à des réactions émotives, comme les fois où j’ai essayé de discuter avec des intersectionnelles.

 

D’ailleurs, il a suffi que je rédige une réplique qui invitait à documenter les problèmes des garçons et à proposer des solutions, plutôt que de faire dans l’émotion et l’enflure verbale et que de blâmer les féministes, pour susciter de la colère. Une telle invitation implique pourtant que, loin de nier la possibilité que les garçons aient des problèmes que la société doit prendre en compte, je l’admets parfaitement et j’encourage à faire quelque chose de concret.

 

Il est également à noter qu’il y a levée de boucliers quand les féministes défendent leur mouvement en rappelant ce que je rappelais précédemment : on a dû lutter pour que les femmes puissent voter, être propriétaires, avoir un statut égal à celui de l’homme dans la famille, accéder à l’université, accéder à toute une variété de professions, et ces gains des femmes sont tout récents. Et pourtant, tout cela, ce sont des faits. « Ne me parlez pas de faits historiques, je préfère me fier à mes impressions personnelles et mes impressions personnelles disent que je vis dans un matriarcat. », voilà comment sonnent à mes oreilles ceux que j’ai vus applaudir au texte de Bombardier.

 

Sans parler de la grossièreté de certains d’entre eux quant à leurs choix de termes pour parler des féministes. Mais ils n’acceptent surtout pas qu’on leur réponde sur le même ton. C’est pour ça que je compare les discours de ceux que j’appelle les intersectionneaux à ceux des intersectionnelles : dans les deux cas, il semble y avoir chez ceux qui les tiennent une sorte de conviction profonde qu’ils ont la légitimité d’être impolis et insultants avec les gens, ils accusent les autres de faire ce que c’est surtout eux-mêmes qui font. Quand ils se font répondre sur le même ton que celui qu’ils emploient avec les autres, ils crient au patriarcat pour les secondes, et au matriarcat pour les premiers.

 

Qu’est-ce qui a vraiment dérangé les féministes dans tout ça ?

 

Selon les intersectionneaux, les féministes ont protesté parce qu’on a parlé des problèmes des garçons à l’école. Je trouve ça un peu court : est-ce vraiment parce qu’on a parlé des problèmes des garçons à l’école que les féministes ont réagi et se sont mises à rappeler combien l’égalité en droits est récente et combien les femmes avaient jusqu’à il y a assez peu de temps un statut social inférieur ? Ne serait-ce pas plutôt parce que certains partent du constat de ces problèmes, pour en tirer une conclusion aussi ridicule qu’insultante, celle selon laquelle on vit maintenant dans un matriarcat, voire même que le Québec a toujours été un matriarcat ? Parce qu’en effet, il y a un grand pas entre les deux.

 

Ne serait-ce pas aussi parce qu’en plus de constater les problèmes des garçons et de demander qu’on cherche des solutions, on a prétendu que tout était la faute des féministes ? Que les féministes réagissent mal parce qu’on souhaite que les garçons puissent réussir à l’école aurait certes de quoi choquer ; qu’elles réagissent mal parce qu’on nie la légitimité de leur mouvement alors que les faits historiques ET actuels montrent très bien que l’émancipation des femmes est récente ici et loin d’être atteinte ailleurs, et parce qu’on les blâme pour des problèmes de manière gratuite est au contraire parfaitement compréhensible.

 

Pouvons-nous revenir sur terre ?

 

En conclusion, j’ai vu autre chose au passage : certains ont fait le lien entre le soi-disant matriarcat et un autre concept douteux : semble-t-il qu’il y aurait un impérialisme LGBTQ… Quiconque me lit sait très bien que personne n’est plus critique que moi de la théorie (sic) du genre. Je suis la première à lutter contre ces nouvelles idées selon lesquelles on serait femme ou homme ou ni l’un ni l’autre en fonction d’un concept obscur nommé l’identité de genre, et que tout le monde a la responsabilité d’adapter son vocabulaire et de piler sur sa sensibilité pour ne pas heurter celle d’une minorité de personnes, qui voudraient faire admettre à tout le monde que le caractère sexué de l’espèce humaine n’est pas une réalité objective. Je me joins à mes consoeurs féministes pour m’opposer à certaines revendications des personnes trans ou autoproclamées non binaires.

 

Par contre, quand on est rendu à prétendre que les LGBTQ font la loi, on tombe encore une fois dans l’enflure verbale ! L’homme blanc hétérosexuel et masculin serait supposément la victime par excellence dans notre société…aussi vrai qu’on vit dans une culture du viol au Québec ! Certains parlent de propagande gaie ! Les homosexuels existent et ils font ce qu’ils veulent entre eux. Qu’est-ce qu’ils imposent aux autres ? Si vous voulez me convaincre qu’ils imposent quelque chose aux autres, il faudrait préciser quoi et le montrer. Pour ce qui est des personnes trans et autoproclamées non binaires, bien que je sois opposée à certaines de leurs revendications, sincèrement, regardez autour de vous : ont-elles vraiment pris le contrôle de l’espace public ? Combien de personnes trans ou autoproclamées non binaires rencontrez-vous par jour ? Combien y en a-t-il qui occupent une place influente ? On peut vouloir mettre des limites à leurs revendications, mais il ne faudrait pas leur inventer un pouvoir qu’elles n’ont pas.

 

On dirait qu’il n’y a plus moyen d’avoir un débat sain, en gardant la tête assez froide pour garder le sens de la réalité…mais peut-être que c’est comme ça à toutes les époques ?

Libérer la colère

Je suis allée au lancement de ce livre par curiosité. Après les lectures d’extraits, j’ai été presque déçue qu’il n’y ait plus d’exemplaires à vendre, parce que j’étais curieuse de le lire. Je n’aurais probablement pas « accroché », comme on dit en québécois, mais j’étais curieuse.

 

L’ambiance était très agréable. En fait, je m’attendais à sentir de l’hostilité à mon endroit, comme c’est généralement le cas quand je vais à des événements liés au féminisme intersectionnel, mais finalement, peu de gens semblaient me connaître. Dalila Awada a eu affaire à moi à deux reprises, j’imagine qu’elle se sera rendu compte que je n’ai rien de menaçant. Seule Camille Robert, qui était présente en tant que lectrice et amie je présume, m’a fait un « sourire » contrarié (coucou, Camille, heureuse de t’avoir rencontrée). Pour en revenir à l’ambiance, on sentait la solidarité entre les femmes qui étaient présentes.

 

Pour ma part, les textes qui se concentrent plutôt sur l’émotion que sur l’argumentation ne me rejoignent pas (ce qui ne veut absolument pas dire que ce ne sont pas des bons textes, c’est simplement que ça ne me rejoint pas). J’aurais tout de même quelques remarques à faire. Je dois admettre que l’extrait qu’on nous a lu qui réfère à la réaction d’une mère dont la fille lui rapporte qu’elle a été agressée sexuellement est venu me chercher. Avoir été agressée et faire face à l’indifférence, ou pire, aux reproches de ceux dont on attend du soutien, c’est malheureusement quelque chose qui existe. Je ne peux que souligner le courage de l’auteure qui en a parlé de façon aussi franche, aussi crue, en public. Voilà qui est beaucoup plus convaincant que les discours qui cherchent à théoriser la « culture du viol » en mélangeant la drague maladroite avec les agressions sexuelles.

 

La lecture d’extraits en anglais, avec des phrases que des hommes sortent à répétition aux femmes, avait quelque chose de rigolo (le rire était partagé dans l’assistance). Sans surprise, les hommes qui m’accompagnaient ont réagi en disant que ce n’est pas juste aux femmes qu’on dit ces phrases-là. Eh oui, messieurs, il y a bel et bien des manières que beaucoup d’entre vous avez avec nous qui peuvent être très agaçantes. Je vous aime quand même.

 

Globalement, j’ai trouvé ça intéressant. Deux éléments m’ont agacée. D’abord, la femme qui a tenu à dire, avant de commencer à lire, que nous sommes en territoire non cédé. J’ai toujours été à fond pour la reconnaissance des droits des Premières nations, mais ce n’est pas en déformant l’histoire que vous allez arranger quoi que ce soit.

 

Dalila Awada a encore une fois mis sur le compte du racisme les critiques et les moqueries qu’elle reçoit. Dalila, je ne te connais pas. J’ai échangé avec toi une fois de vive voix et deux fois par écrit, et je t’ai trouvée très courtoise, j’ai même envie de dire que tu m’as inspiré de la sympathie. Tu sembles être une femme sensible, et on ne peut pas nier que tu fais preuve d’un certain courage en prenant la parole en public, tu t’exposes à des réactions qui ne seront pas toutes agréables.

 

Mais justement, tu t’exposes. Et il me semble que tu simplifies à outrance ce qui motive les réactions négatives de, disons-le, un grand nombre de personnes. Être contre le voile, contre les religions en général, contre l’islam en particulier, ou même contre l’interprétation de l’islam que tu défends par le port du voile, ne repose pas forcément sur le racisme. Je me suis moquée de toi à plusieurs reprises, je ne peux pas le nier. Je n’ai pas toujours mis des gants blancs en répondant à ton discours non plus. Je n’ai aucun doute que tu reçoives des commentaires qui dépassent les limites de la décence, j’en ai été témoin, et moralement, je désapprouve cela. Cependant, il faut que tu assumes que c’est le prix à payer quand on prend la parole en public. Denise Bombardier, Sophie Durocher, Mathieu Bock-Côté, Judith Lussier, Lili Boisvert, Guy A Lepage, et bien d’autres Blancs y ont droit eux aussi. De plus, ne néglige pas la possibilité que ce soit ton discours (verbal ou non verbal, parce que ma chère, l’habillement fait partie du discours non verbal, que ça te plaise ou non), et non le fait que tu sois « racisée », qui provoque des réactions.

 

Peut-être que je lirai le livre un de ces quatre, par curiosité. Je doute qu’il me rejoigne vraiment puisque, comme je l’ai déjà dit, il semble plutôt axé sur l’émotion que sur l’argumentation. Dans la mesure où il est clairement présenté comme ça, on ne peut pas en faire le reproche aux auteures, cependant.

Le deux poids deux mesures de la gauche régressive

Le deux poids deux mesures de la gauche qu’on peut qualifier de régressive, je le constate régulièrement depuis au moins deux ans. Dernièrement, j’ai eu le nez dedans plus que d’habitude, étant donné leur acharnement des derniers jours sur ma personne à cause d’un meme sur ma page Facebook. Dans ce meme, je faisais l’éloge de six personnes qui sont des vraies féministes, tout en me moquant de trois autres personnes qui se disent féministes mais qui à mes yeux ne le sont pas. J’ai traité une personne de niaiseuse (et je ne sais plus combien de personnes m’ont signalé que c’est une doctorante, comme si ça éliminait la possibilité d’être niaiseux), j’ai dénoncé l’imposture d’une deuxième personne, et la tendance au mensonge et à la violence – surtout verbale, même si ce n’était pas spécifié dans le meme – d’une troisième personne.

 

Au moins quatre notables de la gauche régressive ont fait une publication sur leur propre compte Facebook au sujet de mon meme, pour le dénoncer. Ils sont vraiment furax, et y voient carrément un raison pour laquelle je ne devrais pas occuper l’emploi que j’occupe. Et pourtant, on parle de personnes qui, pour plusieurs d’entre elles, exercent un métier assez semblable au mien, mais surtout, qui dans tous les cas, s’adonnent à des choses parfaitement comparables au meme qui fait scandale à leurs yeux, soit en les faisant elles-mêmes, soit en cautionnant que d’autres les fassent. Voici des exemples (la liste n’est pas exhaustive) de ce que j’ai vu faire à des gens qui se scandalisent de mon meme.

 

J’en ai vu un bon nombre traiter Mathieu Bock-Côté d’imbécile en faisant un jeu de mot enfantin avec son nom. D’ailleurs, j’aurais beaucoup de mal à croire qu’ils ne savent pas que Monsieur Bock-Côté est, non pas doctorant, mais docteur. Le deux poids deux mesures est flagrant.

 

Ils appellent Sophie Durocher Sophisme Durocher. Ils me reprochent d’avoir injurié les trois personnes que je considère comme des fausses féministes, au lieu de répondre à leurs positions par des arguments, mais on ne les voit jamais, eux, répondre aux idées de Sophie Durocher par des arguments (au fait, elle s’appelle Sophie, et ça veut dire sagesse).

 

On en a vu se réjouir de la mort de Parizeau, ce « sale homme blanc, symbole du patriarcat, et hétéro et cisgenre en plus ». Se réjouir de la mort d’une personne, voilà qui est infiniment pire que tout ce que j’aie publié sur qui que ce soit sur Facebook. Rendu là, ce n’est même plus comparable à ce que je fais, c’est pire.

 

Ils se mettent régulièrement à plusieurs pour utiliser une diversité d’expressions, dont plusieurs sont tout à fait grossières, pour traiter publiquement François Doyon de malade mental et de nuisance. Voici deux expressions qui sont restées spécialement gravées dans ma mémoire : narcissique puant et peste bubonique. Et le pire, c’est qu’ils s’imaginent sincèrement qu’en faisant ça, ils défendent la justice sociale. S’en prendre avec violence et grossièreté à un bouc émissaire serait une façon de défendre la justice sociale, faut le faire ! Et après, ils se demandent pourquoi leur frange de gauche est qualifiée de régressive !

 

Chaque fois que Xavier Camus leur donne l’occasion de parler de Djemila Benhabib, ils sont plusieurs à la traiter de menteuse ou de mythomane (c’est drôle, parce que c’est exactement la même chose qu’ils me reprochent). D’autres la traitent d’autre chose, elle aussi a droit à des commentaires gratuits sur sa santé mentale (incidemment, je ne fais jamais ça, moi, des commentaires publics sur la santé mentale des gens, spécialement pas des gens que je ne connais pas personnellement).

 

On en a vu plusieurs traîner dans la boue l’association féministe Pour les droits des femmes au Québec (PDF-Québec), y compris en disant que le féminisme de cette association n’est pas du vrai féminisme ou qu’il est dépassé. S’ils ont le droit de faire ça (ils l’ont, en effet), j’ai tout autant le droit de dire du mal de la FFQ (qui devrait référer à Fausses féministes du Québec plutôt qu’à Fédération des femmes du Québec). La FFQ n’est pas plus utile à l’émancipation des femmes qu’une cuillère de bois est utile pour débarrer une porte. Je le dis. Je le redis. Et je suis dans mon droit.

 

Finalement, puisque je suis sur mon blogue personnel, je ne me gênerai pas pour conclure avec l’exemple qui me concerne personnellement : ces gens qui se scandalisent à cause de mon meme tiennent des propos injurieux et grossiers à mon endroit, et pour certains d’entre eux, cela est régulier depuis un an et demi à quelques années. Voici des exemples notables de propos qui me visent : pourriture, déchet humain, personne toxique, truie, ado en manque d’attention, narcissique qui s’ignore, malade mentale, crisse de folle, ne devrait pas avoir le droit d’exister.

 

Je sais bien ce que vont se dire ces gens s’ils lisent mon billet (je suis pas mal convaincue que certains d’entre eux le liront d’ailleurs) : que non non non, ce n’est pas la même chose, parce qu’eux ils s’en prennent à des mauvaises personnes, c’est pour ça que ça devient vertueux d’agir comme ça avec eux. Voilà qui est parfaitement typique des gens endoctrinés et des sectes : diviser le monde en bons et en mauvais, et avoir une conception de l’éthique selon laquelle tout est permis avec ceux qui se classent dans la catégorie des mauvais. Seulement, il faudrait qu’ils finissent par prendre conscience que cette conception ne vaut que dans leur cercle idéologique. Quiconque n’a pas subi le même endoctrinement qu’eux verrait sans problème qu’ils font la même chose qu’ils reprochent à d’autres, voire encore pire. Dans toute conception de l’éthique digne de ce nom, il y a une recherche d’impartialité. Comment espèrent-ils être pris au sérieux quand ils reprochent aux autres ce qu’eux-mêmes font allègrement?

Mon grain de sel sur la série Fugueuse

Je n’ai pas l’habitude d’écrire sur des questions de sentiments, ni même d’en parler avec mes proches : je ne suis pas douée pour le faire et ça me met mal à l’aise. Cependant, la série Fugueuse m’incite à le faire, exceptionnellement. Notez que ce que je vais écrire ne relève pas de la condamnation, ni n’exprime un inconfort. J’exprime plutôt de l’incompréhension…il y a quelque chose qui me dépasse chez le personnage de Fanny. Dans le dernier épisode, juste de voir les scènes de chorégraphie pour le clip de Damien, la pensée qui m’est venue est que je ne comprends que des femmes se sentent vraiment fières de se placer dans des situations aussi humiliantes : à trois autour du dieu mâle…elles sont des accessoires qui montrent sa gloire à lui ! Ce n’est pas une question de porter une petite tenue, ni de jouer sur la séduction, les femmes peuvent parfaitement faire l’un et l’autre sans se déshumaniser comme ça !

Est-ce qu’il y en a d’autres que moi qui ont senti une pointe d’exaspération à la fin de l’épisode de lundi, en voyant que Fanny était retournée chez Damien? Je m’en suis voulu en même temps, parce que c’est un manque de charité de ma part…mais mon empathie semble avoir atteint sa limite avec une situation comme ça. Je n’arrive pas à me mettre à la place de Fanny[1].

En fait, c’est ça l’affaire : je ne comprends pas. Nous ne sommes pas toutes pareilles sur le plan des sentiments et des émotions, et parfois, les différences font en sorte de nous empêcher de comprendre. Il y a vraiment quelque chose qui m’échappe dans le rapport que certaines filles peuvent avoir avec les hommes. Susciter l’intérêt de garçons nettement plus âgés quand j’étais adolescente, j’ai connu ça…ma réaction a été la méfiance. Je n’ai jamais été impressionnée non plus par des biens matériels, un grand appartement, encore moins par la drogue (alcool compris). J’ai toujours préféré faire mes premières expériences de consommation dans un contexte où j’étais en sécurité. Je ne comprends pas non plus qu’on continue de considérer comme son chum un gars qui a manifestement d’autres « blondes »…je pourrais continuer de le voir, mais je ne le considérerais pas comme mon chum, et je n’attendrais certainement pas après lui (j’aurais d’autres amants moi aussi).

Avec tout ça, je viens de me rendre compte que je n’ai même pas parlé du fait qu’il l’a incitée à se prostituer, ce qui est bien entendu le pire dans tout cela…la raison est probablement que pour moi, ça s’arrêterait bien avant qu’on en soit rendu à ce stade-là. Bref, je ne sais pas quoi dire d’autre que : je ne comprends pas…

 

[1] Il ne faut pas perdre de vue que l’empathie n’est pas la même chose que la compassion : ça ne m’empêche pas d’avoir de la compassion pour une jeune fille qui vit une situation comme celle-là, seulement je n’arrive pas à me mettre à sa place, à comprendre ce qui la motive.

La gauche régressive et l’école

metremblayMarie-Ève Tremblay a produit un court documentaire qui a fait mouche, sur la volonté de censure, notamment en milieu universitaire. Je craignais depuis longtemps que cela finisse par toucher les cégeps, et il semble que ce soit maintenant le cas. Je ne suis pas suffisamment informée sur les raisons de la suspension de Jean Laberge pour commenter. Par contre, je constate une volonté, chez certains militants, de décider qui devrait avoir le droit d’enseigner au cégep. Cela est d’autant plus effronté de leur part qu’ils ne prennent pas la peine de s’informer vraiment sur les enseignants, ils portent généralement leurs jugements en se basant sur du ouï-dire, sur les positions que prend l’enseignant, sur des captures d’écran prises ici et là. On pourrait résumer cela comme suit : si l’enseignant exprime des convictions qui ne sont pas au diapason de leurs orientations idéologiques, alors à leurs yeux, il ne devrait pas enseigner.

 

Mon collègue et ami François Doyon est souvent dans leur mire. François est certes souvent cru dans ses écrits sur les réseaux sociaux. Il est antithéiste, ce qui lui vaut, comme à tous les antithéistes qui osent s’exprimer publiquement, des accusations d’islamophobie. François a les études qu’il faut pour enseigner la philosophie, il fait preuve de la rigueur que l’on doit attendre d’un enseignant en philosophie, il a des connaissances non seulement en philosophie, mais aussi sur les religions. Étant donné qu’il est mon ami en plus d’exercer le même métier que moi, lui et moi échangeons régulièrement des documents que nous utilisons pour nos cours, et il est très clair qu’il est compétent. Mais cela ne compte pas : il n’a pas les bonnes convictions, alors il faut le détruire. Hier soir, j’ai vu un meme mensonger à son sujet sur une page Facebook, prétendant qu’il discrimine ses élèves et ses collègues qui ont des croyances religieuses…je crois que la discrimination n’est pas là où certains le croient ! Si quelqu’un est victime de discrimination, c’est bien François ! Véhiculer des mensonges pour ruiner la réputation de quelqu’un et même chercher à lui nuire au travail, cela dépasse les limites de la liberté d’expression.

 

J’ai aussi été victime de ce genre de propagande, on est allé jusqu’à «avertir» l’administration du collège où je travaille de mes «comportements toxiques». Les personnes qui s’acharnent sur moi depuis plus d’un an et demi n’ont jamais pris la peine de s’informer sérieusement sur mon enseignement, ni sur mon rapport avec mes élèves. Ils inventent des histoires qu’ils se racontent entre eux et auxquelles ils prêtent foi sans aucune autre forme de procès (des histoires comme quoi j’intimiderais des élèves, discriminerais les élèves qui ont des croyances religieuses, celles qui portent le voile, les personnes trans…). Tout cela est complètement faux, j’aime mon métier, je dis souvent que mes élèves sont des trésors, et mon premier souci est de favoriser leur réussite, quelles que soient leurs croyances, leurs caractéristiques personnelles. Je vois en eux mes élèves avant tout.

 

J’ai les études nécessaires pour enseigner la philosophie au niveau collégial. Cela fera bientôt huit ans que j’enseigne, et mon rapport avec les élèves a toujours été plutôt bon. Bien sûr, comme presque tous les enseignants et professeurs, il y en a qui m’apprécient moins. Il arrive que certains élèves soient choqués par ce que j’enseigne : certains sont très mal à l’aise avec la théorie de l’évolution, ou encore avec les extraits de God Delusion de Dawkins que je leur fais lire. Il faut s’y attendre : j’enseigne la philosophie, et la philosophie implique de la remise en question, d’être confronté à des idées qui dérangent, contrairement aux mathématiques. Il n’en demeure pas moins que tous mes élèves peuvent compter sur un traitement impartial et équitable, leurs travaux sont corrigés selon des critères qui portent sur le contenu et la forme de ceux-ci, et non sur leurs auteurs.

 

Le raisonnement de ceux qui se croient capables d’évaluer des enseignants sans les côtoyer, ni même s’informer sur leur travail semble se résumer comme suit : « Cet enseignant est contre la religion, alors il doit discriminer les élèves qui ont des croyances religieuses. Si un enseignant s’exprime contre le voile islamique, il discrimine sûrement ses élèves qui le portent. Si un enseignant est critique face à l’idéologie du genre, il discrimine certainement les élèves trans. » Vous savez je suis contre McDonald. Croyez-vous que mes élèves qui arrivent en classe avec un sac de McDonald risquent un traitement défavorable de ma part ? Je vous assure que ce n’est pas le cas. Et c’est la même chose pour tout ce contre quoi j’ai pu m’exprimer publiquement : avoir des convictions, prendre position et s’exprimer, n’est pas incompatible avec le professionnalisme au travail.

 

Si je faisais le même genre de raisonnement que ceux qui s’en prennent à François et à moi, je supposerais que les enseignants qui sont contre la laïcité, ou favorables à la religion, ou croyants, doivent discriminer leurs élèves antithéistes. Qu’un enseignant qui est pour le droit à l ‘avortement et qui apprend qu’un de ses élèves est contre l’avortement risque de le faire échouer à cause de ça. Ridicule ? En effet.

Lettre ouverte à Xavier Camus

Monsieur Camus,

Comme vous le savez certainement aussi bien que moi, la remise en question est essentielle en philosophie. Refuser la remise en question et se fier sur l’approbation d’une foule, à plus forte raison une foule que l’on sait vendue d’avance à ses position, n’est pas très conforme à l’attitude philosophique. C’est une attitude indigne de la part de quelqu’un qui a une formation en philosophie et qui compte l’enseigner. Récemment, mon confrère François Doyon a fait parvenir une plainte à l’ombudsman de Radio-Canada parce qu’on avait fait appel à vous pour un reportage sur un groupe d’extrême-droite, une plainte que notre confrère Marco Leclerc et moi-même avions contribué à rédiger et que nous avions publiée sur notre webzine Discernement. Juste avec vos réactions récentes à cette plainte, on peut montrer (à nouveau) votre façon de tordre la réalité, de tordre les propos des autres et de vous poser constamment en victime, en passant bien sûr sous silence tout ce que vous avez pu faire pour vous attirer des inimitiés[1].

Selon un statut paru aussi bien sur votre page Facebook personnelle que sur votre page publique, que l’on peut voir ici comme photo principale, vous interprétez que la plainte de Monsieur Doyon avait pour objectif de vous empêcher de vous exprimer sur la place publique. Ce seul extrait révèle à la fois votre tendance à tordre les propos des gens et votre tendance à vous poser en victime. En effet, il ne s’agissait pas de vous empêcher de vous exprimer, mais de ne pas vous prendre pour ce que vous n’êtes pas : un spécialiste de l’extrême-droite. Si vous aviez été invité à vous exprimer à une émission de variété, comme Tout le monde en parle, Denis Lévesque, Sophie sans compromis, etc., ça n’aurait pas dérangé Monsieur Doyon, ça ne m’aurait pas dérangée non plus (nous aurions peut-être réagi au contenu de vos propos si nous avions été en position de savoir que vous disiez des faussetés, mais nous ne nous serions pas insurgés que vous soyiez invité à vous prononcer).

Le problème avec le reportage de Claude Brunet, c’est qu’il s’agissait, justement, d’un reportage. Dans un reportage, on est censé donner des informations dont on a vérifié l’exactitude et l’objectivité. Dans la réponse qui a été donnée par l’ombudsman, celui-ci souligne que nous n’avons rien contesté quant à vos propos inclus dans le reportage ; non, en effet, puisque nous non plus, nous ne sommes pas des spécialistes de l’extrême-droite. Le problème que nous soulevions est ailleurs : sachant que vous avez prouvé par le passé que vous ne vous gênez pas pour écrire des « comptes rendus » en vous basant sur du ouï-dire qui vous vient de deux ou trois personnes – proches de vous en plus – que vous ne vous rétractez même pas après que plusieurs personnes aient démenti ce ouï-dire, que vous avez l’habitude de tirer des conclusions à partir de quelques photos ou de quelques captures d’écran glanées ici et là, que vous critiquez des livres sans les avoir lus (vous l’avez fait pour le collectif L’islamophobie paru en 2016), bref, sachant que vous utilisez des procédés qui n’ont rien de fiable, et que cela peut facilement vous mener à diffuser des faussetés, nous avons des bonnes raisons de nous méfier de votre parole sur n’importe quel sujet. Bref, Monsieur Camus, dire que vous n’êtes pas qualifié pour apporter des informations dans le cadre d’un reportage, n’est pas du tout la même chose que s’opposer à votre liberté d’expression.

Cela est d’autant plus vrai que vous prétendez régulièrement vous en tenir toujours aux faits alors qu’il est très facile de voir que vous tordez régulièrement ceux-ci, vous allez jusqu’à tordre les propos des gens. Prenez ce passage de votre statut : « [L’ombudsman] a souligné que les personnes derrière la plainte faisaient une fixation sur l’islam. » Voici les propos réels de l’ombudsman : « Il est utile de mentionner que la page Facebook en question présente surtout des textes pourfendeurs de la « gauche », du « multiculturalisme » et du « fanatisme religieux », particulièrement « musulman », et de ceux qui dénoncent « l’islamophobie ». « Ce n’est pas exactement la même chose, n’est-ce pas Monsieur Camus ? Il est à noter que la description de l’ombudsman n’est pas conforme à la réalité non plus. D’abord, Discernement est au départ un webzine et non une page Facebook, même s’il existe une page Facebook qui est consacrée à ce webzine. Ensuite, nous ne nous opposons pas à LA gauche, surtout que plusieurs des auteurs qui écrivent pour ce webzine, y compris François Doyon et moi-même, sommes de gauche. Nous critiquons une frange de la gauche et non toute la gauche (et cela est tout aussi vrai pour les auteurs qui écrivent pour le webzine qui s’identifient comme de droite). L’ombudsman ne nomme que trois auteurs alors que neuf auteurs participent à Discernement. Finalement, l’ombudsman passe sous silence que notre webzine présente des billets féministes, des billets sur la liberté d’expression, des billets sur des personnages importants du christianisme, etc. La gauche, le multiculturalisme, le fanatisme religieux et les prétentions qu’il y a de l’islamophobie alors qu’il n’y en a pas ne sont pas nos seuls sujets. Bref, vos propos cités ici sont une reprise déformée de propos déjà erronés. Le jeu du téléphone…

Vous ne décrochez pas d’un commentaire écrit par Monsieur Doyon il y a des mois, que vous interprétez comme une menace de vous faire perdre des opportunités d’emploi. Ne vous déplaise, Monsieur Camus, je connais Monsieur Doyon mieux que vous, et son commentaire n’avait rien d’une menace. Monsieur Doyon énonçait une réalité : quand on commence une carrière, il est important d’éviter de froisser des gens qui pourraient se trouver sur les comités de sélection à qui on risque d’avoir affaire, à la direction des entreprises pour lesquelles on souhaite travailler ou dans les départements dont on souhaite faire partie.

Vous avez diffamé Djemila Benhabib à plusieurs reprises. Celle-ci est certes controversée, mais elle est aussi appréciée par beaucoup de gens, incluant possiblement des personnes qui pourraient être en position de vous sélectionner ou pas pour un poste. Indépendamment de Madame Benhabib, vous tenez publiquement des propos susceptibles de déplaire à beaucoup de gens, et même des propos qui visent directement des gens. En l’occurrence, vous aviez écrit publiquement du mal de Monsieur Doyon, et ce dernier pointait ce fait comme exemple pour illustrer son propos : pourquoi voudrait-il travailler avec quelqu’un qui le diffame publiquement ? D’autres que Monsieur Doyon pourraient être ciblés par vous, ou avoir des proches qui le sont, ou être choqués par vos façons de faire, et avoir exactement la même réaction. Ainsi, Monsieur Doyon ne faisait que souligner que vous risquez de vous nuire à vous-même.

Monsieur Camus, sachez que ceux qui travaillent dans les cégeps ne partagent pas tous votre orientation idéologique. Il serait prudent de votre part, non pas de cesser de défendre vos positions, mais de montrer moins de certitude arrogante, comme si vous aviez la Vérité, et de montrer davantage de respect pour ceux qui ont des positions différentes des vôtres. D’ailleurs, vous vous vantez souvent d’être ouvert au dialogue, alors qu’il est de notoriété que vous bloquez à peu près systématiquement quiconque vous contredit, même quand c’est fait poliment et avec des arguments. Alors au lieu de tordre les propos de Monsieur Doyon et de tenir pour acquis que ce n’est jamais vous qui avez tort, essayez donc de vous remettre un peu en question.

Que dire de cet autre extrait de votre statut récent : « Tout ça pourquoi? Parce que j’ai déjà critiqué Djemila Benhabib par le passé. Big deal…Comme le rappelle l’ombudsman de Radio-Canada dans le rejet de sa plainte, Mme Benhabib est une « polémiste ». Je suis tout à fait en droit de critiquer ses idées si ça me chante. Vous croyez en la liberté d’expression ou pas, M. Doyon? » Monsieur Camus, il serait grand temps, en tant que blogueur mais SURTOUT en tant que personne ayant une formation en philosophie et ayant l’intention de l’enseigner, que vous fassiez la différence entre les critiques et les mensonges. Vous avez menti en ce qui concerne les liens (imaginaires) entre Djemila Benhabib et la Meute. Que des membres de la Meute disent s’être inspirés d’elle ne signifie absolument pas qu’elle y est associée, pas plus que Sam Harris n’est associé à moi, même s’il est un auteur inspirant pour moi. Madame Benhabib aussi, je la connais beaucoup mieux que vous. Elle ne veut rien savoir de la Meute. Elle n’a JAMAIS accepté que la sécurité lors des événements qu’elle organise soit assurée par la Meute.

De plus, un philosophe devrait s’assurer d’appuyer ses critiques sur des prémisses solides, de bien connaître les discours qu’il critique avant de les critiquer. Entre autres, il semble clair que vous n’avez jamais lu Ma vie à contre-coran, puisque vous avez écrit, et je vous cite : « Elle y annonçait déjà ses couleurs de troll anti-islam ». Voici pourtant un extrait de Ma vie à contre-coran :

Contrairement à ce qu’on croit trop souvent, les musulmans ne forment pas un bloc monolithique. Ils appartiennent à des classes sociales, des cultures, des nations différentes. L’islam se décline au pluriel et regroupe plusieurs visions antagoniques. Reconnaître cette diversité, c’est permettre l’expression de voix jusque-là inaudibles parmi les musulmans, notamment celle des laïcs. Il ne peut exister UNE communauté musulmane, mais DES communautés musulmanes, parmi lesquelles on compte une majorité respectueuse des valeurs démocratiques de ce pays. Dans le débat concernant les accommodements raisonnables, les immigrants de foi ou de culture musulmane sont les grands perdants. Ils sont devenus des suspects alors que la plupart d’entre eux ne demandent aucun accommodement, mais simplement la possibilité de partager leurs diverses expériences avec leurs coreligionnaires. De grâce, ne les rendons pas coupables par association. Ne les stigmatisons pas. Ils sont porteurs d’expériences formidables ; ils sont une richesse pour le Québec. S’il est vrai qu’il existe une multitude d’islams, reste à savoir lequel est soluble dans la démocratie. C’est cette épineuse et complexe question qui nous interpelle collectivement. Ne laissons pas aux seuls musulmans la responsabilité historique d’en décider. Cet enjeu, nous devons y répondre ensemble dans la transparence, l’échange, l’ouverture et la vigilance. Doit-on réinventer notre démocratie pour accommoder les islamistes ou s’assurer plutôt qu’ils n’interfèrent pas dans les affaires de la Cité ? […] Si l’État continue de faire l’autruche et de fermer les yeux sur l’énorme malaise des immigrants face au marché de l’emploi, il contribuera à nourrir un ressentiment qui ne peut conduire qu’à un immense gâchis et à l’exclusion. (BENHABIB, Djemila, Ma vie à contre-Coran, Montréal, VLB, 2009, p. 25-26)

Saviez-vous par ailleurs, Monsieur Camus, que Madame Benhabib a organisé à plusieurs reprises des activités où elle donnait la parole à des musulmans issus de divers milieux, de diverses cultures, afin de leur donner la chance de parler notamment de leur rapport à leur religion ? En caricaturant ses positions comme vous faites, vous vous rendez coupable de la même chose que les gens xénophobes, racistes contre les Arabes ou hostiles aux musulmans en général (parce que oui, je reconnais que ça existe, et Monsieur Doyon le reconnaît aussi), qui récupèrent des éléments de son discours sortis de leur contexte afin d’appuyer une vision des choses qui n’a rien à voir avec la sienne.

Finalement, vous reprochez à Monsieur Doyon de vous « offrir comme cible aux haters ». Vous n’avez pas tort. Cela fait partie des réactions auxquelles vous devriez vous attendre, comme je le mentionnais en introduction. À ce sujet, j’aimerais attirer votre attention sur le traitement que vous réservez vous-même à Djemila Benhabib et à François Doyon sur vos pages (et j’ai eu l’occasion de constater que vous me faisiez la même chose et que vous le faites aussi à plusieurs autres personnes). Pour ce qui est d’offrir des gens comme cibles aux haters, vous ne donnez pas votre place!

Vous êtes lu par des gens qui haïssent Djemila Benhabib et qui se font un plaisir de lire du mal d’elle, sans se soucier de l’exactitude des propos. De votre côté, vous semblez vous faire un plaisir de leur donner satisfaction. Voici quelques exemples de commentaires agressifs, injurieux à l’endroit de Madame Benhabib que l’on peut trouver sur vos pages, sans aucune modération de votre part (il vous arrive même de faire J’aime sur les commentaires) :

 haters benhabib

haters benhabib 2

haters benhabib robert

Je vous rappelle d’ailleurs que Madame Benhabib a été contactée par la police au sujet du colloque ayant eu lieu le 29 septembre dernier, auquel je participais : vos écrits au sujet de ce colloque nous ont valu la nécessité de surveillance policière pour un colloque qui portait sur la religion, le racisme, le féminisme et la science ! Votre réaction devant cela : tenir pour acquis que Madame Benhabib mentait. Ce fut également la réaction de vos supporters. Mais encore une fois, remettez-vous un peu en question ! En tant que conférencière invitée à ce colloque, je suis de ceux qui ont eu le nom et les coordonnées du policier chargé de l’enquête et j’ai communiqué avec lui. Je confirme que Madame Benhabib a dit la vérité. Certains de vos sbires ont cherché à me soutirer ces informations, ou de les soutirer à Madame Benhabib. Devant notre refus de répondre, la réaction de vos sbires s’est composée de ricanements et d’une certitude satisfaite que Madame Benhabib avait effectivement menti. Croyez-vous vraiment que ce genre d’information est à donner à n’importe qui ?

Vous avez le droit de critiquer Djemila Benhabib, Monsieur Camus. Mais si vous continuez de le faire de cette façon-là, alors assumez que vous ne vous ferez pas seulement des amis et que les gens qui apprécient cette écrivaine, ou même simplement les gens qui ont le souci de la vérité et de la rigueur intellectuelle se retourneront contre vous (j’ai bien dit le souci de la vérité et de la rigueur intellectuelle, pas celui de faire triompher votre vision des choses ; vos supporters ont tendance à confondre les deux et à se vanter d’être soucieux de la vérité, mais ils se font des illusions). Si vous voulez continuer de jouer à ce jeu-là, ne vous plaignez pas que Monsieur Doyon et d’autres poursuivent la partie.

Voyons maintenant le genre de commentaires que vous suscitez sur François Doyon, et même un commentaire franchement arrogant que vous vous permettez sur lui :

  commentaire arrogant et insultant de Camus envers Doyon

Doyon haters A

Doyon haters.png

haters doyon

haters doyon 2.png

haters doyon 3haters doyon et collin mensonge de dubois

Notez, dans la dernière capture, le mensonge d’Ebbie Dee, aussi connue comme Elisabeth Dubois, qui prétend que François Doyon et moi-même avons intimidé des gens (cherchez des preuves que nous avons réellement intimidé des gens, vous n’en trouverez jamais ; il nous arrive de nous moquer, d’être impertinents, mais de l’intimidation, voilà une chose que nous n’avons jamais faite), et la volonté exprimée de nous empêcher d’enseigner : n’est-ce pas ce que vous déplorez qu’on vous fasse, Monsieur Camus?

Voici une autre capture d’écran prise sur votre page Facebook, particulièrement intéressante, avec un commentaire montrant qu’on vous croit sur parole à l’effet que Monsieur Doyon est un intimidateur (ce qu’il n’est pas), et un commentaire dont seul l’émoticône à la fin permet de douter que ce soit un appel à harceler l’administration du cégep de St-Jérôme :

appel à la violence envers St-Jérôme.png

Encore une fois, il est à noter que plusieurs de vos supporters parlent de chercher à faire perdre son emploi à Monsieur Doyon, et que c’est précisément ce que vous déplorez que d’autres cherchent à vous faire. Vous savez, à l’époque où vos écrits fallacieux, qui nuisent aux réputations de diverses personnes, ont commencé à déranger, j’ai vu passer des commentaires et statuts Facebook à l’effet qu’on devrait appeler l’administration des collèges qui vous avaient embauché, afin de vous faire perdre vos postes. J’ai réagi à cela, même si je ne vous apprécie pas. J’ai réagi notamment avec un statut public, dont vous pouvez voir un extrait ci-dessous, dans lequel je rappelais à mes contacts et abonnés que c’est à son enseignement et à son rapport avec ses élèves qu’on doit juger si un enseignant est à sa place, et non à ce qu’il écrit sur un blogue ou sur les réseaux sociaux.

ma défense de Camus

Seriez-vous prêt à défendre Monsieur Doyon de la même manière ? Si oui, vous n’en avez pas fait la preuve. Et moi, seriez-vous prêt à me défendre de la même manière ? Vous êtes certainement au courant que plusieurs de vos supporters se permettent de juger que je ne suis pas à ma place dans l’enseignement de la philosophie au niveau collégial, en dépit qu’ils ne savent rien de mon enseignement ni de mon rapport avec mes élèves, qu’ils ne m’ont même jamais côtoyée. Je dis que vous êtes certainement au courant parce qu’il arrive que certains en parlent sur vos pages. Encore une fois, certains véhiculent aussi sur votre page le mensonge à l’effet que j’aurais déjà intimidé des personnes (une capture d’écran ci-dessus en témoigne), un mensonge auquel vous semblez prêter foi sans avoir jamais pris la peine de vérifier.

 

Bref, Monsieur Camus, je vous invite à remettre en question vos façons de faire, et à traiter les gens avec les mêmes égards avec lesquels vous semblez vouloir être traité. Je ne me fais pas d’illusions sur l’effet que cette lettre aura sur vous. Si vous réagissez comme d’habitude, vous demanderez à vos supporters de vous assurer que vous avez raison, et ils s’empresseront de le faire en disant que ce n’est pas la même chose, parce qu’eux et vous-même vous attaquez à des méchants alors que vos détracteurs s’attaquent à vous, qui êtes un gentil. À croire que vos fans voudraient qu’on vous remercie de diffuser des mensonges sur les gens et de les livrer à leur vindicte. J’espère au moins que vous y réfléchirez. Sinon, continuez votre jeu, mais dites-vous bien que d’autres sont capables de jouer aussi.

[1] Il est à noter que je ne cautionne absolument pas les actes de vandalisme qui vous ont visé, ni d’ailleurs aucun acte de vandalisme. Par contre, que les gens réagissent à vos billets par des commentaires, même irrévérencieux, par des moqueries et par des caricatures, vous devriez vous y attendre et les gens qui font cela sont dans leur droit.

Deux heures en compagnie de Haroun Bouazzi et d’Eve Torres

bouazzi torres

Texte écrit avec François Doyon

Jeudi le 25 janvier 2018, nous avons assisté, dans une salle de l’UQAM, à une conférence sur l’islamophobie donnée par Haroun Bouazzi et Eve Torres. Nous nous sommes rendus à cette activité avec beaucoup de perplexité, étant donné le sous-titre que l’on pouvait lire sur l’affiche : « Un an après l’attentat meurtrier à Québec, les musulman.e.s (sic) québécoi.e.s (sic) sont de plus en plus harcelé.e.s (sic) par le gouvernement et les médias. » D’une part, juste à la façon d’écrire, nous pouvions nous douter que nous aurions affaire à des partisans de ce que nous appelons la gauche régressive : une gauche irrationnelle qui ne fait que dans l’appel aux sentiments, dans les cris à l’oppression, et qui divise le monde en bons et en mauvais, tout en appelant à la censure et en cautionnant les versions les plus rétrogrades des religions, d’où le qualificatif « régressive ». En fait, nous faisions plus que nous en douter, puisque nous connaissons déjà passablement les discours de Haroun Bouazzi et ceux d’Eve Torres. Le premier se fait donner le micro plus souvent qu’à son tour et adopte les nouveaux discours (fallacieux) sur le racisme ; la deuxième a participé à des activités sur le « féminisme » intersectionnel.  Nous nous souvenons d’ailleurs que, lors d’un panel à l’Université de Montréal sur le racisme systémique, Bouazzi a utilisé son temps de parole, non pas pour faire un exposé sur le racisme, mais pour dénigrer trois des panelistes avant d’affirmer qu’ils n’auraient pas dû être invités et d’annoncer qu’il ne resterait pas pour débattre. Quant à Eve Torres, nous nous souvenons de sa présence à un souper faisant la promotion d’une DPJ musulmane le 14 avril dernier. D’autre part, nous trouvons assez audacieux de la part de Bouazzi, qui encore une fois, a largement sa place dans les médias pour donner ses arguments, de parler de harcèlement de la part de ceux-ci. Nous nous demandions aussi franchement de quel harcèlement il s’agissait. Allait-on encore nous parler de la soi-disant islamophobie de Richard Martineau? De Mathieu Bock-Côté? Ou peut-être que le traitement médiatique de la demande de faire du 29 janvier une journée nationale contre l’islamophobie est perçue par ces militants comme du harcèlement? Quoi qu’il en soit, nous nous sommes assis, nous avons écouté, nous avons pris des notes. Nous aurions voulu poser des questions, mais nous avons remarqué qu’on évitait soigneusement de nous donner la parole durant la période de questions, et ce, même si nous avons été parmi les premiers à lever la main.

« Aussi, ce n’est pas parce que le concept d’islamophobie est utilisé trop souvent, ou qu’il est utilisé à tort, que l’on peut conclure que la discrimination ou l’hostilité envers les musulmans n’existent pas. Cependant, si le concept d’islamophobie est frauduleux, ce n’est pas seulement parce qu’il est utilisé trop souvent et à tort ; c’est aussi et surtout parce qu’en voulant le faire passer comme une forme de racisme, on voudrait faire passer l’opposition à une doctrine ou idéologie (l’islam) pour du racisme. »

Bouazzi a introduit son exposé avec un argument qui n’est pas sans poids : invoquer que le concept d’islamophobie est instrumentalisé n’est pas suffisant pour dire que ce concept n’a aucune pertinence. En effet, ce n’est pas parce que le féminisme, par exemple, est instrumentalisé qu’il n’a pas de pertinence (exemple donné par Bouazzi lui-même). On pourrait d’ailleurs en dire autant du racisme anti-Noirs : s’il est possible pour des gens de l’instrumentaliser, il faudrait être bien naïf, ou inconscient, ou de mauvaise foi, pour prétendre que le racisme contre les Noirs est chose du passé. Aussi, ce n’est pas parce que le concept d’islamophobie est utilisé trop souvent, ou qu’il est utilisé à tort, que l’on peut conclure que la discrimination ou l’hostilité envers les musulmans n’existent pas. Cependant, si le concept d’islamophobie est frauduleux, ce n’est pas seulement parce qu’il est utilisé trop souvent et à tort ; c’est aussi et surtout parce qu’en voulant le faire passer comme une forme de racisme, on voudrait faire passer l’opposition à une doctrine ou idéologie (l’islam) pour du racisme. Même les personnes de culture musulmane, même les musulmans croyants mais réformistes se font traiter d’islamophobes parce qu’ils critiquent des éléments de cette idéologie! (Ce n’est pas parce qu’une idéologie a le titre de religion que ce n’est plus une idéologie.)

Bouazzi a énuméré quatre reproches souvent faits au concept d’islamophobie par ceux qui en questionnent la pertinence :

  • il est instrumentalisé pour empêcher les critiques de l’islam ;
  • il a été inventé par des mollahs iraniens pour empêcher de critiquer l’islam radical ;
  • une phobie est une peur et on a le droit d’avoir peur de l’islam ;
  • les musulmans ne sont pas une race.

Bouazzi y est ensuite allé de ses arguments habituels. Il a d’abord signalé que les Noirs ne sont techniquement pas une race non plus. Toute juste que cette affirmation puisse être, ça ne la rend pas moins fallacieuse dans le contexte. L’argument de Bouazzi se complète comme suit : les Noirs sont « racisés » en fonction de leur couleur ; d’autres peuvent être « racisés » en fonction d’autre chose, par exemple, leur religion. Or, s’il est vrai que les Noirs ne sont pas une race, ni même une ethnie (il y a plusieurs ethnies dans lesquelles les gens ont la peau assez foncée pour être classés comme des Noirs), il n’en demeure pas moins que le concept de racisme désigne traditionnellement le fait de hiérarchiser les êtres humains en fonction de facteurs génétiques : la couleur de peau en fait partie. Les religions sont des systèmes de croyances, des idéologies. On n’est pas davantage « racisé » en fonction de sa religion qu’on peut l’être en fonction de si on est anarchiste, libertarien, féministe, écologiste, etc. Mais, nous direz-vous, selon l’origine ethnique, les gens ont plus de chance d’adhérer, ou simplement d’être influencés par une religion plutôt qu’une autre : il y a plus de Marocains musulmans que de Français musulmans. Soit. Vous avez aussi beaucoup plus de chance de trouver des républicains chez les Français que chez les Britanniques, et ça ne fait pas de l’opposition à l’idéologie républicaine une forme de racisme contre les Français. Dénigrer les personnes noires en raison de leur couleur, être convaincu que les personnes noires sont par natures inférieures aux personnes d’autres couleurs, ne peut d’aucune manière se comparer à la critique, même virulente, même irrévérencieuse, d’une religion, d’une doctrine ou d’une idéologie. Aussi, si nous admettons sans problème qu’il existe des gens hostiles aux musulmans (ou aux Arabes, deux groupes souvent confondus par ceux qui nourrissent une telle hostilité), aussi longtemps que l’opposition à des aspects de l’islam, que ce soit le voile, la ségrégation entre les sexes dans les mosquées, ou autre chose, sera assimilée à du racisme, nous persisterons à dire que le concept d’islamophobie est frauduleux.

Bouazzi a d’autant moins de crédibilité lorsqu’il parle de l’islamophobie comme d’une forme de racisme qu’il ne se limite pas aux cas où il semble bel et bien y avoir de l’hostilité envers les musulmans en général. Entre autres, il parle souvent des réactions de beaucoup de gens face aux « femmes qui portent le foulard ». Il est à noter qu’Eve Torres utilise aussi cette expression. Mais les femmes dont il parle ne sont pas simplement “des femmes qui portent le foulard”. Ce procédé de basse rhétorique, Bouazzi l’utilise constamment ; il veut sans doute par là nous faire croire que le voile islamiste est un accessoire comme un autre : « C’est un simple foulard. » Un grand nombre de Nord-Américaines sont “des femmes qui portent le foulard” en hiver. Une femme qui porte le voile islamiste, c’est toute autre chose. Réagir à un signe porteur d’une signification passablement claire, qui heurte nos valeurs, ne peut être assimilé ni à une réaction à un simple accessoire qui nous déplaît (nous n’aimons pas les anneaux dans le nez, mais ceux et celles qui en portent un ne nous communiquent aucun message particulier, alors nous n’avons pas de raison valable de réagir), ni au racisme. De plus, on ne peut pas prétendre que quiconque réagit au voile islamiste montre par là une hostilité généralisée envers les musulmans : ce ne sont pas toutes les musulmanes qui le portent, il y a des musulmans qui s’opposent au voile. Réagir au voile, c’est réagir à un signe qui a une signification socialement établie et passablement claire. Il n’y a pas de raison de supposer, sans indice supplémentaire, qu’une réaction négative face au voile est due à une hostilité généralisée envers les musulmans.

Eve Torres s’est victimisée par rapport au fait que ce que les gens voient surtout chez elle, c’est son voile. Or quand on porte un signe aussi visible et porteur de signification, il faut en assumer les conséquences, particulièrement quand, comme Madame Torres, on assure le faire par choix. Madame Torres déplore que des gens la voient comme une “femme voilée” et non comme une personne pouvant être porteuse des mêmes valeurs qu’eux. Nous, auteurs de ce billet, affirmons sans réserve que nous ne voyons pas Madame Torres comme quelqu’un de porteur des mêmes valeurs que nous. Elle s’est plainte que des gens ne veuillent pas être ses alliés. Et elle, veut-elle vraiment être notre alliée ? A-t-elle la moindre sensibilité quant à l’effet que son voile peut avoir sur :

  • les féministes (particulièrement celles qui ont connu l’époque où les Québécoises ont dû lutter pour pouvoir entrer à l’église sans se couvrir la tête, où la première députée à l’Assemblée nationale a dû lutter pour pouvoir siéger nu-tête, ainsi que toutes celles qui ne négligent pas un passé simplement parce qu’elles ne l’ont pas vécu ; sans parler de celles qui ont lutté et luttent encore contre la mentalité voulant que ce soit aux femmes de se couvrir et qu’une femme peu couverte qui se fait agresser l’a cherché ) ;
  • les femmes qui viennent de pays musulmans, qui ont fui parce qu’elles ne voulaient pas porter le voile islamiste ni se faire imposer les autres règles sexistes des interprétations conservatrices de l’islam ;
  • les personnes LGB (lesbiennes, gais, bisexuel (le)s) qui savent bien que l’homosexualité est présentée comme un péché dans l’islam ;
  • etc.

« [Eve Torres] s’est plainte que des gens ne veuillent pas être ses alliés. Et elle, veut-elle vraiment être notre alliée ? »

Il y a plusieurs raisons qui nous font affirmer qu’une musulmane qui porte un voile ne peut pas partager les mêmes valeurs que nous, auteurs de ce billet. Nous sommes anti-théistes et pro-laïcité. Tout signe d’appartenance à une religion va à l’encontre de l’anti-théisme. Ceux qui viennent avec l’obligation d’être portés en tout lieu, y compris dans les institutions publiques — et c’est le cas du voile islamiste — vont à l’encontre de la laïcité. Nous sommes également pour les droits des LGB et pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Non seulement l’islam présente l’homosexualité comme un péché et infériorise la femme par rapport à l’homme, mais de plus, le voile islamique est directement porteur d’un message très sexiste. Il présente le corps de la femme comme une obscénité qui doit être cachée, il met sur la femme la responsabilité de se cacher pour ne pas inciter les hommes à la harceler, et il fait de la femme un objet réservé à son mari, tout en suggérant qu’une femme ne peut pas avoir d’autres raisons de se vêtir légèrement que de séduire. Son corps est un objet érotique, bien avant d’être un corps humain.

Bref, Madame Torres a certes le droit de porter un voile, mais elle ne peut pas exiger des autres qu’ils fassent semblant qu’elle n’en porte pas. Nous devons être tolérants, mais nous n’avons aucunement le devoir d’être indifférents au voile islamiste, encore moins de l’aimer. Nous n’avons aucun devoir de nous allier à Madame Torres, ni à quiconque affiche des signes exprimant des convictions qui heurtent les nôtres. Si elle prétend qu’elle n’interprète pas son voile comme nous le faisons, elle doit aussi savoir que quand on affiche quelque chose devant les autres, on ne peut pas les empêcher d’interpréter ce qu’ils voient selon les références déjà socialement connues par rapport à ce signe. C’est d’ailleurs pour cela que, dans des contextes particuliers, des limites vestimentaires peuvent être de rigueur.

À la conférence, Annie-Ève Collin portait justement un t-shirt qui s’inscrit dans son militantisme féministe, sur lequel on voyait l’inscription : “Proud TERF”. Elle s’est réapproprié un terme censé être injurieux, employé surtout par des militants transgenre et queers, ainsi que par des féministes (sic) intersectionnelles, qui sert à s’en prendre aux féministes qui refusent l’idéologie du genre et qui refusent que les droits des personnes trans et autoproclamées non binaires s’exercent au détriment de ceux des femmes. Qui aurait la mauvaise foi de prétendre que “ce n’est qu’un t-shirt” ? Ceux qui prétendent que le voile islamiste “n’est qu’un foulard” auraient-ils cette prétention-là aussi ? Revenons à cette espèce d’injonction pour que les autres voient en soi « une personne véhiculant les mêmes valeurs qu’eux », un(e) allié(e) : Annie-Ève ne s’attendrait jamais à ce que des féministes (sic) intersectionnelles ou des militants transgenre ou queers voient en elle une alliée ou une personne qui partage leurs valeurs, spécialement pas quand elle porte son t-shirt avec l’inscription « Proud TERF ». Ces gens sont obligés de tolérer l’existence d’Annie-Ève, son usage de sa liberté d’expression, ils doivent respecter ses droits fondamentaux, mais ils n’ont absolument pas l’obligation de s’associer à elle, et ils ont entièrement le droit de critiquer ses positions, y compris quand elle les exprime par son habillement.

« Prétendre que les croyants seraient exclus parce qu’on attendrait d’eux la même chose qu’on attend de tous, à savoir, respecter des limites quant à leur habillement et exercer leur liberté d’expression dans un cadre compatible avec un décorum qui peut s’appliquer dans telles ou telles circonstances, c’est de la victimisation et un appel aux sentiments. »

Il a été question de la commission Bouchard-Taylor et de la laïcité, particulièrement de l’idée d’interdire les signes religieux dans la fonction publique : selon Bouazzi et Torres, on exclurait des personnes de la fonction publique en imposant un code vestimentaire qui exigerait de ne pas porter de signes religieux. Nous supposons que les personnes “exclues” seraient celles qui portent des signes religieux… et pourtant, nous, auteurs de ce billet, travaillons dans des cégeps publics, où nous devons respecter certaines limites, éviter de porter certains de nos vêtements et accessoires ; nous ne sommes pas exclus de l’enseignement ou de la fonction publique pour autant. Le t-shirt qu’Annie-Ève portait au colloque serait déplacé si elle le portait devant ses classes. Elle n’a qu’à s’habiller autrement au travail. La liberté d’expression lui donne le droit de porter un tel t-shirt, mais la liberté d’expression s’exerce dans un cadre. Les limites quant à ce qu’on communique par l’habillement existent partout dans la fonction publique, pas seulement dans l’enseignement. Dans certains métiers, ils sont nettement plus contraignants que dans les cégeps, il n’est même pas rare qu’il y ait tout bonnement un uniforme à porter. Prétendre que les croyants seraient exclus parce qu’on attendrait d’eux la même chose qu’on attend de tous, à savoir, respecter des limites quant à leur habillement et exercer leur liberté d’expression dans un cadre compatible avec un décorum qui peut s’appliquer dans telles ou telles circonstances, c’est de la victimisation et un appel aux sentiments.

Eve Torres a eu l’audace de prétendre que l’attentat à la mosquée de Sainte-Foy a été vite oublié. Nous n’en revenions tout simplement pas : au contraire, on nous casse les pieds avec ça depuis un an, même quand ça n’a aucune pertinence par rapport au sujet dont on discute. Chaque fois qu’on veut prouver l’existence d’une extrême-droite et d’une islamophobie omniprésentes, on nous ressort cet évènement (dont nous ne voulons cependant pas nier ni minimiser la gravité). Cet évènement est censé prouver l’islamophobie qui imprègne la société québécoise jusqu’aux os, et ceux qui disent cela sont les mêmes qui, à chaque attentat commis par des musulmans intégristes, disent qu’il ne faut pas faire d’amalgames (nous savons que là, c’est nous qui sortons les mêmes arguments qui reviennent tout le temps, mais que voulez-vous, si on nous ressort le même argument fallacieux, la réponse est également la même).

Nous avons également eu droit à quelques enflures verbales de la part d’Eve Torres, notamment lorsqu’elle a présenté Mathieu Bock-Côté comme un cracheur de haine et Jean-François Lisée comme un homme de pouvoir : quel pouvoir le chef de l’opposition, chef d’un parti qui ne cesse de perdre du terrain selon les sondages en plus, a-t-il selon elle ?

En ce qui concerne les enflures verbales, Haroun Bouazzi n’a vraiment pas laissé sa place. Il a insisté sur les privilèges des hommes dans notre société, mais il l’a fait de façon caricaturale, par exemple en disant que la nuit, les femmes préfèrent contourner un parc au lieu de le traverser alors qu’aucun homme ne se pose cette question. C’est complètement faux. Les hommes se font eux aussi agresser dans les parcs et les hommes comme les femmes hésitent à traverser un parc de Montréal-Nord la nuit. Bouazzi n’a-t-il jamais entendu parler des hommes qui se font tabasser dans le Village gai ? Son discours manifeste un manque de nuance et de rigueur assez important.

Au début de sa présentation, Bouazzi, pour prouver l’existence de l’islamophobie, a affirmé que toutes les mosquées du Québec ont été victimes de vandalisme. Lors de la période de questions, une personne dans la salle lui a demandé la source de cette information, en précisant que les fake news ne sont pas pour favoriser la cause des musulmans. Bouazzi a répondu qu’il avait visité une trentaine de mosquées et que toutes celles qu’il avait visitées avaient été victimes de vandalisme, même si cela n’avait pas toujours été rapporté à la police. Il est donc passé de toutes les mosquées du Québec à seulement une trentaine.

Comme s’il n’avait pas suffisamment dérapé, Bouazzi a même fini par déclarer que le droit de porter le foulard (sic) doit être défendu comme le droit de “choisir l’homosexualité”. Ce sont des propos qui font sursauter. La science sérieuse sait depuis un bon moment déjà que l’orientation sexuelle n’est pas un choix. Elle s’impose à nous, et même si elle peut se modifier au cours d’une vie, ce changement n’est jamais volontaire. Si on pouvait choisir son orientation sexuelle comme on peut choisir de porter le voile islamiste, les personnes homosexuelles voulant changer d’orientation ne se suicideraient pas en si grand nombre. Autrefois, on donnait des électrochocs ou on faisait des lobotomies aux personnes qui étaient homosexuelles pour les “guérir”. La littérature scientifique est claire là-dessus : il est impossible de changer volontairement d’orientation sexuelle, même en suivant un traitement. L’homosexualité, comme l’hétérosexualité, n’est pas un choix. Le choix que nous avons, c’est de l’accepter ou non. L’orientation sexuelle est déterminée par des phénomènes environnementaux et génétiques qui sont hors de notre contrôle. L’identité religieuse ne se compare pas à l’orientation sexuelle. Les désirs physiologiques ne sont pas des convictions profondes “authentiques”. On ne peut pas changer de préférence sexuelle comme on peut modifier ses croyances religieuses. En disant que l’on peut choisir son orientation sexuelle, Bouazzi propage un préjugé de la droite la plus rétrograde. En fait, les homosexuels n’ont pas choisi leur orientation, ils ont seulement été chanceux.

Outre tout cela (la victimisation, la prétention d’exclusion alors qu’on se fait demander la même chose que les autres, confondre foulard et voile islamiste, prétendre que l’homosexualité est un choix, dire des énormités au sujet du vandalisme des mosquées, la définition tronquée du racisme, traiter Mathieu Bock-Côté de cracheur de haine, mettre la faute sur les autres sans chercher à se responsabiliser), il est à noter qu’on a eu droit à la prétention que “la blanchité n’est pas une couleur” et, si Bouazzi a passé la soirée à parler du “groupe majoritaire”, il s’est montré incapable de définir ce dernier quand quelqu’un lui a demandé de le faire durant la période de questions. Bien entendu, ils n’ont pas raté l’occasion de nous ramener le référendum de St-Apollinaire. Somme toute, c’étaient les mêmes arguments qu’on nous sert tout le temps, et qui ne convainquent que ceux qui sont déjà vendus à la propagande sur l’islamophobie.